ABRACADABRA

   Pour sceller le sort des universités, le président Trump a été aussi vite et presqu’aussi fort qu’à l’égard de l’Ukraine en suspendant l’attribution d’une grande partie des fonds fédéraux aux plus prestigieux établissements du pays sous des prétextes tout aussi fumeux que ses discours.

Sont visées d’abord les études sur la santé, le climat ou des projets associés aux programmes de diversité, d’équité et d’inclusion. Mais le reste suivra : le président signera par décret la suppression de l’enseignement du droit si les tribunaux fédéraux s’obstinent à déclarer ses ukases illégaux. Pourquoi encore fabriquer des juges et des avocats qui ne comprennent rien à la geste trumpienne ? Laissons l’intelligence artificielle mitonnée par son bouffon, Elon Musk, pondre désormais les jugements. 

Puis il effacera l’histoire car les profs ne parlent que du passé au lieu d’expliquer que le pays vit le moment le plus important de son histoire sous la direction du plus génial dirigeant que le monde a jamais connu. De plus, les historiens ne racontent que des craques : les nazis auraient attaqué les démocraties occidentales, l’Italie aurait été dirigé par une clique de fascistes, le président Poutine aurait dévitalisé toutes les institutions démocratiques mises en place à la chute de l’URSS et fait tuer ses opposants, les Amérindiens auraient été massacrés par des bandes d’immigrés venus peupler les Etats-Unis… Que des bobards débités par des nullards gauchistes. A la porte, bande de provocateurs ! Avec tous les fonctionnaires fédéraux ! Eux aussi remplacés par l’IA. Dieu, que c’est reposant de ne plus croiser un seul être humain dans les couloirs des bâtiments de l’administration ! Tout sera automatique de la naissance à la mort. D’ailleurs, pourquoi encore des êtres humains, je veux dire d’autres êtres vivants que Trump et son fidèle entourage ? 

  L’explosion régulière des fusées de l’entreprise Musk devrait pourtant emmener ce brave homme à s’interroger sur la qualité de ses dispositifs. Il devrait s’empresser d’engager quelques spécialistes pour sauver son business spatial avant qu’ils ne disparaissent dans la nature, licenciés faute de budget. Le départ programmé des Terriens vers Mars est mal parti…  

En cas de nouvelle pandémie aux Etats-Unis, on ne sait trop ce qui va se passer. Près de 10% des agents de la NIH, la principale agence américaine chargée de la recherche biomédicale et de la santé publique, ont déjà été licenciés. Et le ministre de la santé, Robert Kennedy Jr, est connu pour ses informations mensongères sur les vaccins, le covid, etc. Qui pourra encore soigner les Américains ? Reste peut-être quelques sorciers guérisseurs dans les tribus indiennes. On espère qu’ils réussissent à retrouver les remèdes traditionnels qui permettaient de combattre la sorcellerie puisqu’elle a l’air de frapper la classe dirigeante du pays…

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INCIVILITES

Les opposants à la loi sur les sanctions administratives communales pour « incivilités » ont fait le forcing ces derniers jours afin d’empêcher que la loi soit étendue aux mineurs de quatorze ans. Ceux-ci pourront désormais être condamnés pour injure, destruction ou tapage.

Imaginez que la loi eût été d’application au moment où Bachar El Assad fêtait son quatorzième anniversaire. On n’en serait pas là en Syrie. D’abord les Russes n’auraient jamais mis entre les mains d’un petit garçon même ado les trésors les plus abominables de leurs réserves. Un revolver à plomb, une panoplie de cow-boy et basta ! A l’époque, ces jouets auraient suffi à lui faire plaisir. Devenu grand, triste et moustachu, Bachar a pris des goûts de luxe. Il exige maintenant de tonton Poutine des fusées sol-sol, des bombes chimiques et d’autres bazars abominables qu’il croit plus de son âge. Sinon, il casse tout !

Et ses opposants ? A quatorze ans, s’ils se comportaient déjà en gosses turbulents, ils auraient dit merci aux Européens de recevoir un petit colis cadeau contenant des catapultes et des fléchettes. A présent, il leur faut les mêmes joujoux qu’Assad et la présence à leur fiesta de leurs parrains turcs, wahhabites ou qataris pour leur tenir la main et la barbe. Et leur lire le mode d’emploi, chacun dans sa langue.

Dans une tribune parue dans « Libération », Walid Joumblatt, l’éternel chef de la communauté druze au Liban (et qui n’a pas toujours, lui non plus, fait dans la dentelle de Bruges avec ses opposants) dresse un portrait sombre de l’avenir du Moyen Orient : « les beaux jours de l’Andalousie sont révolus, écrit-il joliment, ces jours où juifs et musulmans partageaient une histoire de coexistence, offrant au monde un héritage incomparable ». Et d’avertir que l’on va vers une dislocation de la région où est née notre civilisation tandis qu’un « nouveau type d’inquisition se fait jour dans les pays arabes : celle de l’intolérance, de l’analphabétisme, du confessionnalisme et du tribalisme ».

Le Moyen Orient, principal terrain d’expérience des maîtres-du-monde-aux-petits-cerveaux, est devenu incompréhensible. Comment distinguer les « bons » des « méchants » ? Où trouver les magiciens capables de sauver ces millions de civils, otages dans toute la région, de régimes eux-mêmes manipulés ?

Américains, Européens, tout le monde laisse tomber les bras. Heureusement, de jeunes Belges « éclairés » viennent de trouver la clé. En exigeant le boycott des universités israéliennes, la Fédération des Etudiants francophones (la FEF) a identifié les vrais coupables de ce chaos: les professeurs et les étudiants israéliens. Ouf, on respire ! Grâce à eux, le Moyen Orient est sauvé !

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