NOIR, JAUNE ET AUTRES COULEURS

 Luc Trullemans, typhon électoral ? Les bleu-blanc-belge du parti dit populaire s’imaginent que l’ex-madame Irma de la météo va enfin rendre leur groupuscule visible.

Suffit-il d’avoir montré sa bouille sur le petit écran et de stigmatiser les « gens du sud habillés en tenues traditionnelles » pour mettre les électeurs dans sa poche ?

Depuis quelque temps, le respect des goûts et surtout des couleurs a passé de mode. Une ministre italienne se fait traiter de singe, la garde des sceaux française de guenon, y compris par des enfants, pendant que son collègue de l’Intérieur tente d’échapper au désamour de l’équipe gouvernementale dont il fait partie en dénonçant les Roms. Ils sont « en confrontation » avec les Français, dit-il, offrant généreusement d’aider « les Français contre ces populations. »

Dans ce tohu-bohu, on a du mal à retrouver le chemin de la civilisation. Marine Le Pen menace ceux qui la rangent à l’extrême droite et le nouveau leader bien aimé respecté du PP demande des indemnités parce qu’on l’aurait traité de raciste.

Faut-il se plonger dans les stades de football illuminés par les drapeaux noir-jaune-rouge pour retrouver la fraîcheur d’une fraternité cosmopolite ? Même si les diables rouges ont succombé aux démons jaunes, les supporters ont fêté les joueurs de toutes les couleurs. Façon de rappeler que notre étendard n’est pas blanc pur jus mais joyeusement coloré.

Les lois contre le racisme ne suffisent pas à endiguer la vague révulsive amplifiée par les réseaux sociaux. Pas plus que les leçons de morale et les efforts de beaucoup de profs.

Seul l’exemple donne le la. Laissons les grincheux hystériques plébisciter Trullemans parce qu’il annonce que l’hiver, la neige et les ouragans, c’est la faute à l’Afrique. Mieux vaut plonger dans les livres, les films, mais aussi les jardins ou les villes mélangées pour retrouver un peu de couleurs.

Au hasard, mêlez-vous aux vrais Indiens d’Amérique sous la plume de Louise Erdrich ou aux noirs du sud dans les polars de Kris Nelscott ou dans « 1275 âmes » de Jim Thompson (magnifiquement adapté au cinéma par Bertrand Tavernier sous le titre « Coup de Torchon »). La galère des Chinois est celle de tous les immigrants dans « Seuls le ciel et la terre », le roman déchirant de Brian Leung ou celle des Italiens dans le « Bandini » de John Fante. Dans les années cinquante déjà, la grande Doris Lessing (disparue cette semaine) témoignait des affrontements en Rhodésie dans « Le Carnet d’or ».

Parmi les innombrables films, retenez « My Beautiful Laundrette » de Stephen Frears sur le Londres tutti frutti d’aujourd’hui, « Bamboozled » de Spike Lee. Sans oublier « To be ou not be » de Lubitsch sur la chasse aux Juifs à Varsovie en 1940. Le racisme se dissout dans l’humour.

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LA FEMME DESCEND-ELLE DU SINGE ?

Le titre de cette chronique vous choque ?

Pourtant, vous ne trouvez rien de mal, monsieur, à ce que je dise de vous que vous êtes malin comme un singe. Ni que c’est à un vieux singe comme vous qu’on apprend à faire des grimaces. Vous en êtes plutôt fier. Vous vous réjouissez aussi que les scientifiques nous racontent que les ADN de l’homme et du chimpanzé sont si proches que nous sommes cousins, presque frères. Notre arrière-arrière-arrière-arrière-grand-père était le même brave gras, musclé, plein de poils. Et celui de la femme, non ?

Vous chantez en chœur avec moi, et en riant très fort,

« C’est à travers de larges grilles,
Que les femelles du canton,
Contemplaient un puissant gorille,
Sans souci du qu’en-dira-t-on.
Avec impudeur, ces commères
Lorgnaient même un endroit précis
Que, rigoureusement ma mère
M’a défendu de nommer ici… »

Une seule association féministe a-t-elle jamais demandé l’interdiction de ce « Gorille » très gaulois de Brassens ?

S’il avait chanté la même chose –ou à peu près- de la femelle du grand singe, quel scandale c’eût été ! Quel mauvais goût !

Il y a quelques jours, des habitants de Pékin se sont mis à chasser un singe errant dans le parc de Dongdan. Ils voulaient le tuer pour manger sa cervelle (un plat très raffiné en Chine). C’est vrai que la cervelle d’un singe remplacerait avantageusement le cerveau de quelques hommes politiques que, rigoureusement mon rédacteur en chef m’a défendu de nommer ici… Mais si je disais que la cervelle d’un singe vaut mieux que celui d’une femme ? Oh ! Ce serait totalement incorrect.

L’homme et la femme sont égaux, proclame-t-on – une fois par an. Egaux, peut-être. Mais la preuve est faite : ils n’ont pas le même ancêtre commun. Si l’homme descend du singe, de qui descend la femme ?

De l’oiseau ? Quoi de plus agréable que de comparer la grâce d’une femme, son allure, sa démarche, à celle d’un beau volatile. Une poule ? Disons, une colombe ou un flamant rose. « Mon bel amour, mon cher amour, ma déchirure, je te porte en moi comme un oiseau blessé (Aragon).

La femme descendrait-elle du flamant ?

Mais le flamant, de qui descend-il ? Du singe ? Non. Comme tous les oiseaux, son aïeul était dinosaure. La femme descend donc de cette bête magnifique (« deinos » en grec) qu’on a longtemps considéré comme un reptile. Ceci explique pourquoi Eve a été plus sensible au serpent, sa sœur, qu’à son pauvre vieil Adam de mari. Et pourquoi King Kong est tombé amoureux de la belle Fay Wray (ou de la sublime Jessica Lange dans une version plus récente de l’histoire). La femme et le gorille, on n’en sortira donc jamais…

 

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