JUNIOR, LE ROBOT

   Une étude du CRISP a fait les comptes. Il n’y a jamais eu autant de (petit) fils – et filles – de dans la politique belge depuis l’instauration du suffrage universel. Au hasard, les De Croo, les Michel brothers, Maingain, Clerfayt, Bert Anciaux, Peter Van Rompuy, Patrick Dewael ou Freya Van den Bossche. La reproduction des hommes politiques de la précédente génération est devenue si intense que certains se demandent si elle est d’origine biologique. Y a-t-il un gène de ministre ou de député injecté chez tous ces marmots à la naissance et qui s’empare de leur cerveau, arrivés à l’âge adulte ? 

Quelques chercheurs ont émis une autre hypothèse : plusieurs de ces lardons seraient tout simplement des hologrammes. Thèse discutable à première vue même si parmi eux il y en a une série qui sont manifestement transparents. Mais ils n’apparaissent pas physiquement comme la copie de leur poupa. Heureusement quand on pense à la belle Freya…

D’autres scientifiques ont été plus loin : les fils et filles de auraient été créés par une intelligence artificielle. Les Michel par exemple n’existent qu’en apparence. On peut les toucher, ils ont l’air de manger et de parler comme à peu près les autres êtres humains (même s’ils se montrent parfois anormalement volubiles, un indice). Mais ils seraient fabriqués par une super IA, spécialement consacrée à garnir les bancs des assemblées parlementaires. Les hommes politiques belges sortants de ce moule seraient des produits expérimentaux, mis en vitrine, avant que l’entreprise ne se lance sur le marché mondial (en proposant de petits Trump, mini-Poutine, etc). 

La présence de Mathieu Michel au secrétariat d’état chargé de la Digitalisation est un signe. De son poste, il dispose des moyens de surveiller le parfait fonctionnement des robots familiaux. Et surtout de prévenir les bugs. Mais les machines ne sont pas infaillibles (lui non plus). Ainsi, le départ anticipé de son frère Charles de la présidence du Conseil des Ministres européens pour laisser le fauteuil à Orban résulte sans doute d’une grave erreur technique. BSoD Code 0x00000124 (erreur non corrigible). 

On lui pardonnera. L’IA est encore à ses balbutiements, à sa période d’essai. Les robots enfantés par le père Michel aussi. 

Ce qui est effrayant avec cette théorie c’est que l’IA pourrait aussi ressusciter des morts. Après neuf gouvernements, la Belgique s’est crue enfin été débarrassée de Wilfried Martens. Or, cette invention diabolique peut nous le ramener frais et fringant avec pour perspective cinq, dix, cent nouveaux gouvernements Martens. Et d’autres cauchemars, avec de faux Dehaene ou des Jean Gol rebricolés pour l’éternité. 

Au secours, Mathieu Michel, détruis-nous tout cette ferraille avant que nous ne devenions fous !   

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L’IMAGINATION AU POUVOIR

Puisque ChatGPT fait fureur, que les journaux, radios et télés en débattent tous les jours, j’ai à mon tour voulu me frotter à la bête. Espérant avoir trouvé le moyen de faire écrire ma chronique par un ghost writer 2.0 tout en dévorant mon dessert couché dans un hamac devant ma série favorite. Combien d’étudiants ont déjà confié au robot le soin de leur souffler la solution de leurs problèmes ou de rédiger d’une plume allègre la dissertation sur laquelle ils séchaient depuis des jours ? En prime, l’AI leur a fourni une documentation précise et complète sur le personnage ou le fait historique que leurs bourreaux de profs leur ont mis dans les pattes. 

Un ami avocat à Liège m’a prévenu. « Quand j’ai entré mon nom, ChatGPT m’a appris que j’étais mort… » Bof, un détail. Un jour, l’info sera exacte. Inexorablement. 

Le cœur tranquille, j’ai à mon tour interrogé la bête. Qui suis-je ? Après quelques généralités sur le style de mes livres et leurs thèmes, parfois exactes, parfois moins, ChatGPT conclut en citant, précise-t-elle, mes deux romans les plus connus. 

Et là, surprise, au lieu de citer le titre de l’un ou l’autre de la quinzaine de bouquins que j’ai publiés, il précise que mes romans plus fameux sont « La robe de la mariée » et « Le club des bernard l’ermite ». Voulant l’information tout à fait complète, il détaille même l’intrigue de chacun de ces ouvrages.

« La robe de la mariée » raconte l’histoire d’une jeune femme qui doit faire face à l’antisémitisme de son futur beau-père. « Le club des bernard l’ermite » relate les aventures de quatre amis bruxellois à la recherche d’un appartement. 

L’étudiant qui aura reçu cette réponse précise, parfaite, de son robot favori remettra le texte à son prof, les yeux fermés, certain d’avoir passé l’épreuve haut la main. Seul petit problème, je n’ai écrit aucun de ces ouvrages ! Ni rien qui ressemble de près ou de loin aux passionnantes intrigues que la machine me prête.

Faisant preuve d’une imagination bien plus impressionnante que celle d’un certain nombre d’écrivains que je me garderai de citer, ChatGPT a donc inventé deux histoires, dont elle me prête la paternité, leur a donné un titre et raconté le scénario.

Or, si je n’ai jamais écrit les deux romans que la bête m’attribue, personne ne les a rédigés. ChatGPT ne m’a pas confondu avec un collègue. Il n’a pas mélangé la bibliographie de deux écrivains. Ces romans sont introuvables sur internet. Inconnus au bataillon.  

L’AI n’est donc pas une machine froide, rigoureuse, sérieuse mais une bêbête folle, délirante, fantaisiste et farfelue. Capable de bien plus de pieds de nez et de chefs d’œuvre que pas mal d’êtres humains ! 

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GOUVERNEMENT ROCK ‘N ROLL

L’irruption des réseaux sociaux a tout chamboulé dans le fonctionnement de la démocratie, désormais rythmée par les buzz, les tweets plus ou moins spontanés des internautes et la dictature des émoticônes. Pouce levé, pouce abaissé ou doigt d’honneur, en quelques secondes, le sort de ceux qui nous dirigent en est jeté en quelques secondes.

On comprend la hâte de Gérard Collomb à rejoindre les rives paisibles du Rhône et les tables étoilées de Lyon, où l’on prend son temps, loin du supplice chinois auquel il était condamné jour après jour alors qu’il avait cru que le poste de ministre de l’Intérieur couronnait sa fidélité au nouveau pacha.

Le président Macron lui-même, dont on croyait qu’il maîtrisait les règles de la communication, passe son temps à se planter à chacune de ses apparitions, entre selfies ridicules et déclarations à l’emporte-pièce à des « vrais gens ». A force de vouloir courir derrière les djeunes, il commence à manquer de souffle, le gamin…

Mais quel être humain pourrait tenir à ce rythme ? à ce bombardement continu ? On comprend les difficultés du président français à reconstituer un casting capable de résister à pareille pression. Pourquoi ne pas songer alors à remplacer les hommes et les femmes politiques, en tout cas ceux qui sont le plus exposés/explosés, par des robots.

L’intelligence artificielle se développe aussi rapidement que la bêtise des internautes. Elle seule est capable désormais de la prendre de vitesse.

Jamais R2-D2, le délicieux petit robot de Star Wars, n’aurait été pris en défaut comme le pauvre Gérard Collomb, acculé par la presse dans la grotesque mais sinistre affaire Benalla à tenir des propos ridicules et manifestement mensongers. Alors qu’il suffit à R2-D2 de s’exprimer par des sifflements et des bips électroniques pour mettre l’audience dans sa poche. On ne comprend pas plus son discours que celui du ministre de l’Intérieur français, mais tout le monde est convaincu par ce que dit le petit robot, rit et applaudit.

Dans un monde, où les politiques sont sans cesse confrontés à leurs propres mensonges, déclarations et promesses hypocrites, le salut est dans les machines. D’autant que lorsqu’il ment, le nez du robot ne s’allonge pas.

Imaginez Marie-Christine Marghem remplacée par R2-D2. A lui, les déclarations incompréhensibles sur la fourniture d’électricité cet hiver pendant qu’elle distribue tranquillement ses tracts dans les rues de Tournai.

Il est vrai que si les robots-ministres sont programmés pour réagir exactement selon l’humeur sans cesse changeante de l’opinion publique, on peut s’attendre à un gouvernement rock’n roll…

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