J’IRAI CRACHER SUR VOS HECATOMBES

« Papa, je suis condamné à mort. Mais ne le dis pas à maman ». 

Ce sont les derniers mots écrits par un jeune Iranien, Mehdi Karami, avant d’être pendu le 7 janvier 2023. Karami fait partie de cette charrette de manifestants qui, ayant survécu aux tirs de la police après la mort de Mahsa Amini dans les geôles de la police des mœurs, ont été exécutés. Quelques autres attendent encore dans le couloir de la mort. On ne sait s’il faut d’abord saluer le courage de ces hommes et femmes qui remettent en cause l’étranglement de la liberté au risque de leur vie ou constater que les autorités iraniennes sont en train de perdre la tête. En décimant leur propre jeunesse. Mais la république islamique a le triste privilège depuis qu’elle a mis le voile sur le pays d’être devenue championne de la peine de mort dans le monde après la Chine.  

Tout occupés à négocier un nouvel accord sur le nucléaire, les Occidentaux assistent gênés et sans grande réaction à cette barbarie. J’irai cracher sur vos hécatombes ! Les Iraniens sont-ils d’ailleurs encore demandeurs de pareil traité alors qu’ils se sont empressés de mettre au point l’arme atomique à marches forcées depuis que le président Trump a déchiré le précédent traité, à la grande satisfaction d’une partie des dirigeants iraniens ? Pourquoi les Occidentaux sont-ils si mous ? Il faut reconnaître qu’il y a beaucoup d’intérêts économiques pour nos entreprises côté mollahs ce qui nous fait un peu baisser le ton. D’autant que nous avons déjà fort à faire avec tous les autres états qui violent allégrement les règles les plus élémentaires de la civilisation, y compris sur notre propre continent. S’il fallait remonter les bretelles de tous les régimes scandaleux, on n’aurait plus ni pétrole, ni gaz, ni métaux précieux et rares ! Rien que des mines de charbon abandonnées…

Pendant ce temps, un de nos compatriotes, travailleur humanitaire, Olivier Vandecasteele, a été condamné à 28 ans de prison et à 74 coups de fouet. 

Une fois de plus, on doit saluer le travail unanime des juges iraniens tous aux ordres du pouvoir qui font semblant d’avoir étudié le droit alors qu’ils n’ont suivi que des cours de boucherie.

La condamnation d’Olivier Vandecasteele est purement cynique puisqu’elle a pour objet de récupérer Assadollah Assadi, un agent soi-disant diplomatique iranien, condamné pour terrorisme (un projet d’attentat contre des opposants iraniens à Paris). Cet échange, qui sauvera une vie mais donnera raison aux preneurs d’otages, est pour l’instant bloqué par un recours contre le traité de transfèrement devant la cour constitutionnelle.     

Omar Khayyan a écrit : « Avant notre venue, rien ne manquait au monde. Après notre départ, rien ne lui manquera ». Le grand écrivain perse du 11ème siècle avait-il eu la prémonition de l’arrivée (et du départ) de la dictature des mollahs ? 

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CHERE ZAHRA RAHNAVARD

   En France, un certain nombre de fous furieux, heureusement minoritaires mais un peu bruyants, prétendent que la santé de leurs chères petites têtes bouclées serait en danger si leurs profs leur racontaient qu’hommes et femmes, c’est pareil. Et le zizi, alors ?

Faudrait peut-être envoyer ces gaillards, qui se vantent de vivre dans la patrie des droits de l’homme, en voyage en Iran. Ces jours-ci, à l’occasion de l’anniversaire des trente-cinq ans de la révolution islamique, il doit y avoir des prix promotion. Mais, si elles les accompagnent, qu’ils n’oublient pas de couvrir leurs épouses de la tête aux pieds et de leur recommander de la fermer.

Chère Zahra, vous qui avez osé vous exprimer haut et fort à Téhéran, vous voilà enfermée et interdite de parole. Alors que vous aviez lutté contre la tyrannie du shah. Et accueilli avec soulagement un régime nouveau qui prétendait apporter enfin liberté et valeurs à un peuple opprimé pendant des dizaines d’années, sinon de siècles. Or, depuis trois ans, après avoir perdu une à une toutes vos fonctions, le droit d’exposer vos peintures, de publier vos livres, vous voilà confinée chez vous, avec interdiction de sortir, aussi muette et cloîtrée que jadis les femmes dans le harem.

Pourtant, chère Zahra, vous avez cru, et vous croyez toujours que le destin des femmes n’est pas inexorable même dans une république où la religion est au centre de l’espace public. Vous avez raison. Les artistes qui ont léché les bottes des tyrans sont tombés en poussières et leurs œuvres dispersées dans l’oubli. Le combat des vrais artistes qui ont défié les interdits stupides a sauvé l’âme de leurs peuples.

Il est tellement plus facile de crier que d’agir. Vous, chère Zahra, vous n’avez pas seulement écrit, sculpté, peint. Vous avez osé mettre la main à la pâte, à la direction de l’université Alzahra – première femme à accéder à pareille fonction-, travailler avec le président Khatami. Pire, vous avez aussi activement participé que Michèle Obama à la campagne de votre mari, M. Moussavi, pour la présidence de la république. Vous avez publiquement critiqué le système. Exigé devant la foule le droit des femmes. Mais les dés étaient pipés. Et vous voilà coincée là où les dirigeants actuels de l’Iran rêvent d’enfermer toutes les femmes.

Chère Zahra, vous est seule chez vous mais vous n’êtes pas seule. Au-delà des murs de votre maison, les femmes iraniennes portent vos espoirs, votre combat. Au-delà des murs de votre pays, les femmes du monde entier partagent votre vision.

Vous qui avez écrit un livre intitulé « La beauté de la dissimulation et la dissimulation de la beauté », vous ne pouvez que triompher…

Zahra Rahnavard est soutenue par Amnesty qui en a fait son invitée (absente et pour cause) à la Foire du Livre de Bruxelles.

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