Le peuple, le peuple. Des candidats aux élections, des gilets jaunes aux protestataires de tous poils, ils sont tous à en appeler au peuple, quand ils ne se prennent pas eux-mêmes pour le peuple, comme Mélenchon ou Le Pen.
Face aux dictateurs, à leur violence, leur intolérance, la violation des droits de l’homme, on oppose la démocratie, la souveraineté sortie des urnes, le vote des citoyens. Le peuple ne se trompe jamais, paraît-il.
Mais il a bonne mine, le peuple, qui vient de réélire à une confortable majorité le patron de la Hongrie, M. Orban. Sans coup d’état ou l’aide de l’armée pour se maintenir sur son trône. Non, il s’est vu renouveler le mandat que lui a donné le peuple par les urnes comme nos paisibles dirigeants de la Vivaldi.
Et Poutine ? Lui aussi a été élu et réélu. Le président turc, Erdogan également. Et les dirigeants du PiS (Droit et Justice) en Pologne.
Alors, le peuple, t’as reçu une brique sur la tête ou quoi ?
Que dira-t-on si Marine Le Pen entre à l’Elysée ? Qu’on ne discute pas la voix du peuple ?
Sûr que ça rendra amer le chocolat de Pâques… Les Français auront beau chanter L’Amère/ au ciel d’été/confond ses blancs moutons/avec les anges si purs/ ils auront l’air malins. Cependant que Tom Van Grieken sera reçu en premier invité étranger, peut-être même avant Poutine, en attendant que, devenu président de la région flamande, TVG accueille à son tour la nouvelle présidente de la France à Bruxelles, sa capitale, au son de l’hymne du Vlaams Belang.
On commence à se dire que Churchill n’avait peut-être pas tort quand il disait que « la démocratie est le pire système de gouvernement » (mais il ajoutait « à l’exception de tous les autres ».) Si on ressortait le tirage au sort des dirigeants pratiqué dans la Grèce antique (redevenu très à la mode ces derniers temps, faute de mieux), au moins on pourrait dire que le hasard s’est trompé, pas le peuple. Voilà ce qu’en pensait Platon : « La démocratie advient quand les pauvres sont vainqueurs de leurs adversaires, qu’ils en tuent une partie et en exilent l’autre et qu’ils partagent à égalité entre le reste de la population l’administration et les charges, et les magistratures y sont le plus souvent attribuées par des tirages au sort ».
Chez nous, on déclare que le peuple est souverain. Mais le problème du souverain c’est qu’il ne fonctionne correctement que s’il existe des contre-pouvoirs. Or, qui peut s’opposer au peuple ?
Un proverbe de la Bible dit avec beaucoup de sagesse : « Faute de vision, le peuple vit sans frein ».
Or, qui fait rêver le peuple, qui propose un destin dans cette époque chaotique, apocalyptique où on ne peut choisir qu’entre la guerre, la maladie et le dérèglement climatique ?
Allez, le peuple, remet l’imagination au pouvoir à la place de tous ces prophètes de malheur !
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