UN PEU PEUR

   De quoi a peur Sergueï Lavrov, l’indéboulonnable ministre des Affaires étrangères de Poutine ? Pour que ce vieux diplomate, habitué à pratiquer une langue de bois châtié, se sente acculé à débiter des discours délirants sur la présence de nazis au sommet de l’état ukrainien. Puis obligé de justifier l’absurdité de ses accusations quand on lui fait remarquer que le président Zelensky est juif en balbutiant que les pires antisémites sont précisément juifs. Cela indique que le trouillomètre de ce pauvre Lavrov est sur le point d’exploser. 

 A-t-il à ce point peur de Poutine ? D’une piqure par un parapluie bulgare dans un couloir du Kremlin ? D’une pincée de poison dans le samovar du thé que lui sert sa maman tous les dimanches après le poulet-compote ? 

  Et Poutine ? La frousse doit lui avoir brûlé une partie du cerveau pour déployer une telle sauvagerie auto-destructrice – que restera-t-il de son armée après la guerre d’Ukraine ? 

Etrangement, lui aussi se réfère aux juifs. En dénonçant les sanctions infligées à son pays comme un véritable pogrom. On sait que les juifs ont souffert des Russes (et des Ukrainiens) pendant des siècles. Mais que Vladimir Vladimirovitch présente aujourd’hui son peuple comme des victimes juives, on se frotte les yeux.

   Tout le monde a peur en Russie, sauf un homme, Vladimir Ovtchinnikov, ce vieux peintre qui dessine des colombes sur tous les murs de sa ville, Borovsk. (Rassurez-vous, il a été condamné).   

  Mais il n’y a pas qu’en Russie et en Ukraine que règne la peur. Cet horrible sentiment se généralise sur toute la planète. En Chine, avec ce confinement brutal et inhumain face au covid. Chez nous où l’apocalypse climatique ne terrifie plus seulement les petites filles suédoises. Les deux années d’épidémie et ses mesures exceptionnelles, l’incompréhension devant ce mystérieux virus, sont-elles en partie la cause de cette angoisse ? 

   Regardez aussi la France. Les uns craignent Macron, les autres Le Pen ou Mélenchon. C’est la peur de disparaître qui pousse les uns à s’unir aux Marcheurs, les autres aux Insoumis, pas l’enthousiasme ni les convictions. 

En Flandre, les écolos cherchent un président désespérément. Peur encore d’assumer des responsabilités politiques.      

Une peur au moins est justifiée, la décision probable de la Cour suprême des Etats-Unis de revenir sur la légalisation de l’avortement. Qui ouvre la boîte de Pandore à l’effacement de tous les droits démocratiques si difficilement acquis. 

Si l’on doit craindre non seulement le futur mais aussi le retour vers le passé, où va-t-on ? 

Cours, camarade, le vieux monde est derrière toi…

Le titre de cette chronique est de Félix F. (5 ans), excellent observateur de l’air du temps. 

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SALUT PUBLIC

Le coup d’état s’est produit au soixante-neuvième acte des gilets jaunes. Depuis le début des manifestations, quelques-uns étaient morts de vieillesse, d’autres d’une maladie du foie, pardon du froid. Mais il restait assez de braillards vaillants pour bloquer à nouveau Paris et quelques villes de province. Une fois de trop. Prétexte pour Jean Luc Mélenchon de prendre le pouvoir. Il faut dire que ce samedi-là, un commando avait réussi à entrer dans la maison de la radio, un autre à TF1 et, à la suite d’un relâchement de la sécurité, la lassitude aidant, à s’emparer de l’Elysée. Macron s’était défilé dans le paquet de linges, sauvant sa tête.

Profitant des cris de victoire des manifestants, Mélenchon proclamait aussitôt la création d’un Comité de Salut Public (il connaît ses classiques) et prenait les commandes dans l’intérêt général, à titre provisoire, entouré de deux pro-consuls, Marine Le Pen et Patrick Balkany. En attendant d’improbables élections une fois le calme revenu.
Un référendum proposerait bientôt le texte d’une nouvelle constitution (il suffira de cliquer oui ou non sur chaque article sur un site créé pour l’occasion), un nouveau Code de la Route (obsession des gilets jaunes) et un nouveau code des impôts (selon la même procédure).
La première initiative du « consul » Mélenchon a été inattendue. Il a décidé par ordonnance le rétablissement du calendrier révolutionnaire de jadis, et ce à dater du 25 nivôse an 228 (le calcul repart de 1793). Idée subtile car, complètement perdus, les gilets jaunes n’ont pu organiser leur soixante-dixième acte, incapables de convertir leur agenda (grégorien) en agenda républicain. Fin des désordres.
A la frontière belge, les émigrés français se mêlent aux Britanniques. Théo Francken s’arrache ses rares cheveux. Il est ministre de l’Accueil du gouvernement flamand. Submergée par la vague, la Flandre risque d’être noyée par le flux des Français qui déjà réclament –foutus arrogants !- que tout soit bilingue, du nom des rues aux papelards administratifs. En néerlandais et en même temps en français, c’est l’héritage de la culture Macron.
Tous n’ont pas eu la chance de passer la frontière. Un certain nombre de « collaborateurs de la politique néo-libérale » ont été arrêtés. Et condamnés à visionner en boucle au fond de leurs cellules les discours de Mélenchon jusqu’à ce que mort s’ensuive. « Le mot qui tue », a résumé le pro-consul pour décrire cette résurgence de la Terreur.
L’asile politique lui ayant été refusé en Grande-Bretagne qui a définitivement largué les amarres d’avec le continent, le président déchu Macron s’est réfugié à Guernesey, dans la maison où Hugo qui s’y était exilé jadis a écrit « Les Misérables ». Ce qui lui a permis de citer le grand poète français : « Mieux vaut être la dent que l’herbe » !
Les commentateurs s’interrogent…

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