Après plus de deux mois de farniente, à quoi rêvons-nous ? Aux vacances…
Comment ? A nouveau tout arrêter, se laisser flotter, ne rien faire alors que tout le monde gémit, se plaint du confinement, de l’interdiction de bouger ? Non, merci ! On a déjà vu toutes les séries, réécouté cent fois l’intégrale de Michel Sardou, appris par cœur les sketches de Jean-Marie Bigard, sans pouvoir les partager avec les copains au bistrot du coin, entendu jusqu’à la nausée les spécialistes nous expliquer sur toutes les chaînes qu’ils ne savent rien et son contraire, on a usé tous les prétextes pour battre les enfants pendant qu’ils sont chauds, applaudi sur le pas de la porte – notre seule activité sportive de la journée-, nettoyé la maison matin, midi et soir avec de la vodka à 65°. Basta ! On a épuisé tout ce qu’on peut faire quand on ne peut rien faire. Alors, de grâce, laissez-nous retourner au boulot plutôt qu’à Saint-Tropez !
C’est un point de vue. Il y en a un autre : les vacances n’ont rien à voir avec le confinement. Elles en sont même l’exact contraire. Les voyages touristiques vont complètement vous changer des arrêts domiciliaires.
On ne part pas au loin pour faire la crêpe sur une plage, c’est interdit. Les discothèques, fermées. Oubliez la drague, la danse, les baisers. La piscine ? Qui a envie de faire des heures de file pour plonger, chacun à son tour pendant sept minutes, et nager avec un masque sur le nez, interdiction de se sécher au soleil et obligation de passer sous une douche hydro-alcoolique ?
Non, ce qui attire dans les vacances, ce ne sont pas les vacances mais le voyage. L’important n’est pas d’arriver mais de partir.
D’abord, il y a l’aéroport. Des files jusque dehors avec les distances sociales. Des barrières partout pour faire respecter les gestes barrières. Puis l’attente debout –les fauteuils sont condamnés.
A l’embarquement, on retrouve ce qui nous a tant manqué dans la solitude de notre appartement, le bonheur de se retrouver à piétiner ensemble. Oublier enfin la formule de Sartre, dont on nous a rabâché les oreilles, « l’enfer, c’est les autres». Non, on veut voir les autres, les côtoyer et se rassurer parce qu’ils vivent le même enfer que nous !
La suite de l’expédition se passe aussi mal qu’au départ : masque sur le visage, odeur de désinfectant dans la cabine, hôtesses confinées dans leur réduit. A l’arrivée, rebelote. On sort de l’avion un à un à l’appel de son nom, même procédure pour récupérer les bagages. Faisons le compte, pour une heure et demie de vol deux heures et demie d’attente avant d’embarquer, deux heures et demie pour sortir de l’aérogare. Sous le regard des indigènes qui vous regardent débouler chez eux avec autant d’empathie que si vous débarquiez de Libye par la mer…
Vive les vacances !
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