DENEUVE, AU SECOURS !

  Voilà le président Macron au pied du mur, contraint de chercher en quelques heures une solution à l’épouvantable casse-tête qu’il a provoqué. Repérer l’échelle de secours qui lui permettra d’échapper à la porte de sortie. 

 Dès dimanche soir, il sera confronté au dilemme le plus funeste depuis son entrée à l’Elysée, la nomination d’un gouvernement capable d’obtenir la confiance de la nouvelle assemblée parlementaire. 

Un facho à Matignon ? Non, plutôt s’exiler sur les bords de la mer Noire. Mélenchon ? Ciotti ? Plutôt choisir le Guignol du théâtre du parc du Luxembourg ! Dans ses propres troupes, il ne reste rien ni personne qui puisse recueillir les suffrages de l’assemblée.  

Toujours attiré par les idées astucieuses, Emmanuel Macron s’est écrié « Bon sang ! Mais c’est bien sûr » quand son gourou préféré lui a suggéré un subterfuge pour échapper à l’épouvantable classe politique française que les électeurs lui ont façonnée. Tourne-toi vers la culture, ô Jupiter, lui a-t-il soufflé. C’est ce que la France a de plus beau. Et c’est un remède sans égal à la politique. Une fois de plus, c’est la culture qui sauvera la France du K.O. et lui redonnera une âme.

Pensez donc. Avec Catherine Deneuve au ministère des Pensions, la nouvelle réforme qui fixera l’âge de la retraite à quatre-vingts ans passera comme une lettre à la poste. Sofia Aram en porte-parole fermera le bec de tous les imbéciles. On peut aussi songer à Brigitte Macron à l’éducation quand on voit ce qu’elle a fait de son Emmanuel. 

N’oublions pas l’aide de quelques brillantes bi-nationales, Virginie Effira ou Charline Vanhoenacker, pour faire taire les remugles maussades contre les étrangers. A moins de faire venir de Belgique un homme de gauche pour rassurer les xénophobes les plus agités, Conner Rousseau.

On devra se passer évidemment de quelques absents qui auraient pris une belle place dans le tableau, Victor Hugo ou Albert Camus. On regrettera aussi que le président Macron ait fait entrer Joséphine Baker au Panthéon. Elle aurait fait une première ministre éblouissante. Pourquoi pas désigner alors Kamel Daoud qui connait bien les pays au bord de la guerre civile et qui a réécrit « L’étranger » façon vingt et unième siècle ?  

Complétons le panel avec Adriana Karembeu aux sports, Carla Bruni aux affaires étrangères, assistée de la rédaction de Charlie-Hebdo tout spécialement chargée des relations avec le monde musulman. 

Avec pareille équipe, on est assuré de voir la France repartir comme en 40 (heu non, plutôt en 44…)

En proposant pareil remaniement, nul doute que le président Macron pourra proclamer fièrement Fluctuat nec mergitur (« Il est battu par les flots mais ne sombre pas ») – la devise de la ville de Paris…   

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GUIGNOL 2.0

Je me souviens des débats présidentiels de jadis. Deux messieurs chics qui avaient l’air vieux, même quand ils étaient dans la force de l’âge, s’échangeaient des propos sérieux d’un ton pédant. On sentait qu’ils sortaient des mêmes écoles, fréquentaient les mêmes dîners en ville et s’amusaient de la même façon à participer à ces joutes soigneusement chorégraphiées. Ils maniaient le fleuret et reculaient à la première éraflure avant de reprendre le combat, toujours aussi policés.

De la cuisine un peu lourde du terroir qu’ils nous offraient ces soirs-là, ne restait qu’une bouchée, une formule : « vous n’avez pas le monopole du cœur », « l’homme du passif », etc. C’était bien balancé mais un peu court question humour.

Quand une dame est apparue dans la distribution, on a cru un moment que l’on allait sortir de ce club british policé. « Calmez-vous, madame Royal ! » soufflait Sarkozy faussement flegmatique. « Non ! Je ne me calmerai pas ! » Répétées plusieurs fois ces répliques laissaient augurer avec ces deux-là une bonne tranche de rigolade. Las ! Ils sont vite retombés dans la routine et les codes de l’exercice.

Entre temps, la télé a changé. « Au théâtre ce soir » a été remplacé par les Guignols de l’info. Aux « Incorruptibles » (un mot désormais peu vendeur) a succédé « Loft story »  et les reality shows. L’homme très moyen, la ménagère de moins de cinquante ans ont renvoyé les stars irréelles dans leur vieux monde tandis que les débats politiques étaient remplacés par les numéros d’humoristes. Le citoyen découvrait les principales aspérités des programmes politiques à travers les caricatures qu’en faisaient avec talent Alex Vizorek ou  Charline Vanhoenacker (« De tous les comiques de la Gaule, les Belges sont les meilleurs », remarquait déjà Jules César). Conséquence, le débat Hollande-Sarkozy frôlait l’ennui et la télé vintage de papa.

Cette semaine, après une renversante campagne électorale 2.0, qui tenait plus du feuilleton  romanesque farfelu que de la politique, on a assisté en France à un débat présidentiel d’un nouveau type. Les protagonistes qui avaient assimilé les évolutions des séries (et leur surenchère dans le genre gore), l’explosion des comiques et l’envahissement des écrans par les « vrais gens », s’en sont donnés à cœur joie pour renverser la table.

Plus d’épées mais des kalachnikovs, plus de petites formules distillées pour les livres d’histoire mais des invectives inspirées des tweets de Donald Trump, et paf ! je te fous sur la gueule et bing ! dans le bas-ventre et vlan ! va voir chez Merkel si j’y suis !

Le chômage est au sommet en France. Si les candidats à la présidence prennent la place des humoristes, chansonniers et héros de feuilletons et de télé-réalité, c’est sûr que tous les records vont encore être pulvérisés. Sale temps pour les artistes.

 

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