FARCES ET ATTRAPES

    L’histoire se répète toujours au moins deux fois, écrivait Karl Marx. La première comme une tragédie. La seconde comme une farce. 

   Une illustration dans l’histoire politique belge avec le social-chrétien Wilfried Martens, revenu neuf fois comme premier ministre en treize ans (entre 1979 et 1992), ses gouvernements tombant les uns après les autres comme un château de cartes, donnant l’impression d’assister à la répétition sans fin d’un spectacle de Guignol.

   S’il réussit mardi prochain son come-back, Donald Trump va-t-il faire mentir Karl Marx ? Lui dont le rêve est de réincarner Ronald Reagan, le président qui garde dans l’imaginaire américain l’image d’avoir fait s’écrouler l’Union soviétique. Si Trump est réélu, on peut s’attendre à ce que des manifestants défilent à Washington en criant « Brejnev revient ! Trump est devenu fou ! » 

   On comprend que, dans cette époque troublée, malmenée, de moins en moins compréhensible, où l’on a perdu la plupart des repères, les gens ont soif de découvrir du neuf, à repartir d’une page blanche. Puisque ceux qui nous ont gouvernés jusqu’ici n’ont pu empêcher le chaos, tentons autre chose – sans être arrêtés par l’idée que cette équipe soi-disant neuve peut se révéler pire.

   C’est une des explications par exemple du renversement des alliances en Afrique ex-française, où l’ancien colonisateur, désormais honni, est chassé pour accueillir à bras ouverts la soi-disant efficacité des troupes venues de Russie. 

   Cette Russie qui, elle, remplace sur le front ukrainien ses soldats épuisés, blessés, démoralisés par des bataillons tout frais venus de Corée du Nord. Allez comprendre ce jeu de chaises musicales.  

   Plus près de nous, cette réaction aveugle de se jeter dans les bras de dirigeants qui n’ont jamais participé au pouvoir explique aussi le succès, par les urnes, de l’extrême droite. Une extrême droite ravalée de frais, propre sur elle, qui caresse les micros au lieu de hurler dedans, mais qui n’a rien perdu de ses idées outrancières, mortifères. En France, en Hollande, en Italie, en Hongrie, en Flandre, waw ! 

   Ce qui est piquant c’est qu’on a oublié que l’extrême droite a été au pouvoir dans ces pays et qu’elle a mené à la catastrophe. Mais c’est si loin, oublié. Plus personne ne fait le rapprochement entre le Vlaams Belang et le VNV, collaborateur des nazis, entre Le Pen et Pétain ou entre Mussolini et Meloni (dont le parti est pourtant l’héritier avoué du MSI). 

   Ce qui s’est terminé en tragédie au siècle dernier se transformera-t-il en farce quatre-vingts ans plus tard ? Alphonse Allais écrivait : « les poubelles de l’histoire sont remplies de tendances prolongées ». Si l’on aspire à du neuf, cherchons vraiment du neuf, pas des vieilleries ripolinées pour l’occasion…        

www.berenboom.com 

DRÔLES DE DRAMES

    La France est suspendue depuis des semaines au vote de la réforme des retraites. La question mobilise toutes les énergies, la une de tous les medias, les discours de tous les politiques. Les trains ne roulent plus, les poubelles inondent les rues tandis que les gilets jaunes se préparent à revenir joyeusement par la cheminée. Tout ce charivari, bruits et fureur pour empêcher le report de l’âge de la retraite à 64 ans. Que se passera-t-il dans quelques années quand la Belgique aura annexé la France, importé ses lois et que, devenus belges, les Français découvriront que l’âge de la retraite est de 67 ans ? Ils se jetteront à nouveau dans les rues mais en criant cette fois : « Macron, reviens ! Les Belges sont devenus fous ! » 

   On s’étonne un peu de la violence de la réaction de la rue en France sans que personne ne semble se demander si dans 64 ans, il y aura encore quelqu’un sur terre pour demander de bénéficier d’une pension et à qui ? 

   Oui, que restera-t-il de la planète bleue noyée sous la mitraille, l’acier et le feu ? Ce qui frappe ces dernières semaines, c’est l’explosion de la fabrication des armes. Des armes, jusque là bien emballées, qui servaient à dissuader mais qu’on sort des cartons pour le feu d’artifices. 

La terrifiante et interminable guerre en Ukraine n’explique pas tout. Il y a aussi l’achat de sous-marins nucléaires par l’Australie, qui se méfie de la Chine, la hausse spectaculaire des budgets militaires des Chinois qui se méfient des Américains et des dépenses militaires des Etats-Unis qui se méfient de tout le monde. Sans compter les dictatures africaines qui en ont besoin pour mater leur population, affronter des rebelles de tous poils ou créer des troubles chez leurs voisins. Rayon développement massif des armements, on imagine que les Russes ne sont pas en reste. Sur tous les continents, les usines d’armement tournent à plein régime. 

Dire qu’on s’était étonné du « pognon de fou » distribué, « quoi qu’il en coûte » par les gouvernements un peu partout pendant la pandémie pour que personne ne sombre. Mais ce n’était que roupie de sansonnet face à la flambée des dépenses militaires. Avec cette interrogation au passage : d’où vient tout ce pognon ? Et où se cachait-il ? Alors que chez nous, par exemple, on ne trouve pas une petite enveloppe pour ouvrir immédiatement des centres de refuge décents pour demandeurs d’asile. On pourrait peut-être suggérer à la FN de les financer sur les bénéfices qu’elle doit être en train d’engranger ? 

    « A force d’écrire des choses horribles, s’écrie Michel Simon dans « Drôle de Drame » (où il joue le rôle d’un écrivain), les choses horribles finissent par arriver ». Un sérieux avertissement qui avait été lancé deux ans avant le début de la deuxième guerre mondiale. Vous trouvez la coïncidence bizarre ? Bizarre ? Vous avez dit bizarre ? 

www.berenboom.com

NOUS, ON A REMCO…

L’Italie a la Meloni, mélange de populisme mêlé de gouaille des faubourgs romains, de promesses intenables et d’exaltation d’une Italie où il faisait bon vivre quand elle n’était soi-disant peuplée que d’Italiens et dirigée par un chef, un homme, un vrai. 

D’accord et bonne chance aux Italiens ! Mais nous, on a Remco…

La Russie a une armée trouée de toute part, comme ses pipe-lines, des citoyens qui s’enfuient comme des lapins, des armes atomiques en guise de dernier repoussoir et surtout elle a Poutine, un chef, un homme, un vrai.

D’accord ! Bonne chance aux Russes ! Mais nous, on a Remco…

En Iran, en Afghanistan, les femmes sont reléguées au rang de citoyennes de dernière zone, obligées de se cacher sous des voiles pour ne pas ternir l’image des mâles qui ont seuls le droit de vivre normalement et d’arpenter les rues, la tête haute et la barbe au vent. Quand les femmes se révoltent, on les arrête et même on leur tire dessus. Pendant ce temps, chez nous, certains brandissent le voile comme symbole de la liberté des femmes. Allez comprendre. Car, comment le cacher, là-bas, le pouvoir n’appartient qu’aux hommes, des chefs, des vrais. 

Dommage pour les Iraniennes et les Afghanes. Mais nous, on a Remco…

Une guerre souterraine se poursuit au Yemen depuis plus de huit ans qui a fait des centaines de milliers de morts dont beaucoup de la famine. Sans intéresser les médias. Mais les images changeraient-elles quelque chose à leur sort alors que cette guerre est devenue le champ de bataille entre dictateurs islamiques iraniens et bouchers d’Arabie saoudite. Qui se disputent pour prouver au monde qui d’entre eux sont les chefs, les hommes, les vrais.

D’accord. Mais nous, on a Remco…

L’extrême droite souffle un vent glacé sur l’Europe. De la Pologne à la Hongrie, de Flandre en Espagne, de Suède en Autriche. En France, en Italie, pour accéder au pouvoir, des femmes se sont emballées dans le drapeau néo-facho. Elles feraient bien de se rappeler que ces aventures politiques ne profitent jamais aux femmes. A la fin, apparaît toujours le chef, un homme, un vrai.

Tant pis pour elles. Nous, on a Remco… 

On ne va pas chipoter, on a aussi Wout Van Aert, les Belgian Cats, les Diables rouges, le plus grand nombre de ministres et de gouvernements au km 2 de toute la planète, les meilleures gaufres de Liège du monde qui se mangent chez Siska en Flandre, Manneken Pis, Angèle et Stromae. Tous des chefs, d’accord. Mais, avouez-le, cette année, on a surtout Remco…

Ce qui magnifie Remco c’est d’avoir arrêté le temps. A suivre ses exploits, on sort de cette succession de malheurs et de drames qui rythment l’actualité quotidienne. Il nous réconcilie avec le temps long, en se défonçant pendant des semaines à pousser sur ses pédales dans des décors éternels. On respire, enfin… 

www.berenboom.com

FUME C’EST DU BELGE !

  Inutile de vous décrire la consternation d’Emmanuel Macron en apprenant que Jean-Luc Dehaene est mort en 2014 à Quimper.

  Son ami Charles Michel lui a tant vanté les talents du Démineur qu’il ne voyait que lui pour bricoler vite fait, plus ou moins bien fait, un accord entre des partis qui se haïssent, le temps d’arriver au bout de son nouveau mandat (plus que cinq ans).  

   N’est-ce pas ainsi que la Belgique est gouvernée ? En faisant ministres des gens qui s’invectivaient la veille et se proclamaient ennemis irréductibles. Juste le genre de montage dont Macron a besoin. 

   Il y a une autre possibilité, a soufflé notre décidément très écouté ex-Premier. Gouverner sans réunir le Parlement. Ne vous faites pas tant de soucis. Le bazar avance tout seul. Tenez le gouvernement Leterme, battu aux élections, a continué sans la moindre manifestation d’opposition ni politique ni dans la rue, à gouverner le pays pendant 589 jours depuis sa chute. Et moi-même, a ajouté fièrement Michel junior, j’ai continué tranquillement comme si rien n’était alors que mon principal partenaire avait claqué la porte. 

Gouverner en se moquant du Parlement. On a fait plusieurs fois un procès en arrogance à Macron, on a dit qu’il n’acceptait de dialoguer qu’avec un seul partenaire, son miroir. Mais ça, non, il n’osait pas. Peut-être que s’il y avait un roi au-dessus de moi, je pourrais tenter le coup mais on n’a pas le temps de rétablir la monarchie (même si les Français sont mûrs pour l’accueillir. Ce serait drôlement plus emballant qu’une sixième république). 

Bref, ce qu’il cherche le pauvre Macron, c’est un nouveau Démineur, un pro de la politique mais indépendant des partis en présence, et qui parle français. Qui d’autre qu’un politicien belge ? 

Son premier choix, Bart De Wever. Un type capable de demander l’indépendance de sa région mais de gérer le gouvernement fédéral sans état d’âme. Mais notre castar a fait la fine bouche en constatant qu’il n’y avait qu’une poignée de régionalistes. Avec dix élus à placer en priorité, on ne va pas loin, a-t-il conclu avant de décliner l’offre du président français. Magnette ne voulait pas trahir ses camarades français, Nollet ses amis verts, le président du Vlaams Belang mettait comme condition préalable la garantie que Marine Le Pen serait enterrée au Panthéon après sa mort. Il s’est finalement résigné à appeler Raoul Hedebouw. Mais ses préalables lui ont fait lever les cheveux : l’indexation automatique des salaires ? Vous êtes fou ? L’obligation pour les députés d’abandonner l’essentiel de leur allocation parlementaire à leur parti ? Qui est prêt à ça ? 

Finalement, il a dû revenir à son constat de départ : seul le roi des Belges pouvait tirer de cette situation pourrie un gouvernement d’ennemis prêts à travailler ensemble. Au Palais, on prétend ne rien savoir.    

www.berenboom.com

UN PEU PEUR

   De quoi a peur Sergueï Lavrov, l’indéboulonnable ministre des Affaires étrangères de Poutine ? Pour que ce vieux diplomate, habitué à pratiquer une langue de bois châtié, se sente acculé à débiter des discours délirants sur la présence de nazis au sommet de l’état ukrainien. Puis obligé de justifier l’absurdité de ses accusations quand on lui fait remarquer que le président Zelensky est juif en balbutiant que les pires antisémites sont précisément juifs. Cela indique que le trouillomètre de ce pauvre Lavrov est sur le point d’exploser. 

 A-t-il à ce point peur de Poutine ? D’une piqure par un parapluie bulgare dans un couloir du Kremlin ? D’une pincée de poison dans le samovar du thé que lui sert sa maman tous les dimanches après le poulet-compote ? 

  Et Poutine ? La frousse doit lui avoir brûlé une partie du cerveau pour déployer une telle sauvagerie auto-destructrice – que restera-t-il de son armée après la guerre d’Ukraine ? 

Etrangement, lui aussi se réfère aux juifs. En dénonçant les sanctions infligées à son pays comme un véritable pogrom. On sait que les juifs ont souffert des Russes (et des Ukrainiens) pendant des siècles. Mais que Vladimir Vladimirovitch présente aujourd’hui son peuple comme des victimes juives, on se frotte les yeux.

   Tout le monde a peur en Russie, sauf un homme, Vladimir Ovtchinnikov, ce vieux peintre qui dessine des colombes sur tous les murs de sa ville, Borovsk. (Rassurez-vous, il a été condamné).   

  Mais il n’y a pas qu’en Russie et en Ukraine que règne la peur. Cet horrible sentiment se généralise sur toute la planète. En Chine, avec ce confinement brutal et inhumain face au covid. Chez nous où l’apocalypse climatique ne terrifie plus seulement les petites filles suédoises. Les deux années d’épidémie et ses mesures exceptionnelles, l’incompréhension devant ce mystérieux virus, sont-elles en partie la cause de cette angoisse ? 

   Regardez aussi la France. Les uns craignent Macron, les autres Le Pen ou Mélenchon. C’est la peur de disparaître qui pousse les uns à s’unir aux Marcheurs, les autres aux Insoumis, pas l’enthousiasme ni les convictions. 

En Flandre, les écolos cherchent un président désespérément. Peur encore d’assumer des responsabilités politiques.      

Une peur au moins est justifiée, la décision probable de la Cour suprême des Etats-Unis de revenir sur la légalisation de l’avortement. Qui ouvre la boîte de Pandore à l’effacement de tous les droits démocratiques si difficilement acquis. 

Si l’on doit craindre non seulement le futur mais aussi le retour vers le passé, où va-t-on ? 

Cours, camarade, le vieux monde est derrière toi…

Le titre de cette chronique est de Félix F. (5 ans), excellent observateur de l’air du temps. 

www.berenboom.com

BONS BAISERS DE RUSSIE

  La Russie vient de couper les ponts avec l’Otan. Un bête geste de dépit après le retrait par l’Alliance des accréditations de huit représentants russes. J’ai failli écrire soviétiques. Mais non, à l’époque de la guerre froide, jamais les Occidentaux n’auraient réussi à mettre la main d’un coup sur huit espions venus du froid. 

Que se passe-t-il à Moscou ? Leurs meilleurs artisans ont-ils perdu la main ? Ont-ils mis à la retraite tous les brillants instructeurs du KGB ou du GRU qui préparaient les coups tordus, qui imaginaient les intrigues sophistiquées et improbables, qui lançaient les plus perverses espionnes pour séduire les candides diplomates envoyés de l‘autre côté du rideau de fer ? Ou ce sont les candidats espions qui sont tous nuls ? On dirait que ce bon vieux James Bond ne fait plus rêver. Ils préfèrent aujourd’hui devenir agents de sécurité d’un oligarque avant de prendre sa place. John Le Carré est parti à temps. Il n’aurait pas supporté de voir une intrigue aussi pauvre alors qu’à l’époque la réalité dépassait toujours la fiction. Décidément, tout fout le camp !  

Petit rappel pour nos amis russes (ce sont nos amis maintenant, c’est peut-être là que le bât blesse et l’origine de la confusion.) Un espion, ça se forme lentement, pendant des années. Quand il était prêt, on l’envoyait ou plutôt il s’installait dans un pays occidental, par exemple en France. Là, il prenait l’apparence d’un Français moyen modèle rêvé par Eric Zemmour. Avec un prénom-bien-de-chez-nous, les photos de ses grands-parents devant la petite église du village de l’Yonne, dont ils n’ont jamais bougé, glissées dans son portefeuille et une carte de supporter de l’AJ Auxerre bien en évidence sur son pare-brise. A la fête des voisins, il tenait des discours sur les immigrés (en dénonçant ceux qui viennent manger le caviar des Français, oui, il y avait parfois un défaut dans la cuirasse). Il se mêlait aux gilets jaunes en les poussant à forcer la porte des bâtiments dans lesquels il voulait pénétrer pour percer leurs secrets. 

Fini tout ça ? Vraiment ? A moins que les Russes ne soient plus machiavéliques qu’on ne le croit, qu’ils laissent nos services de contre-espionnage triompher facilement en laissant expulser huit pauvres types qui ne sont que des leurres pendant que les vraies pros, continuent leur travail de taupe, déguisés en Franchouillards au front de plus en plus bas et de plus en plus national. Mais attention, si on se met à les arrêter, il ne restera plus grand-monde dans les meetings de Zemmour. Et notre faux Français de souche se prétendra victime des services de contre-espionnage de l’OTAN qui tenterait ainsi de casser son irrésistible ascension… 

Il est bien difficile d’être patriote de nos jours. 

www.berenboom.com

CASQUES BLUES

   A quoi sert l’ONU ? Après l’assassinat en RDC de l’ambassadeur d’Italie et deux de ses accompagnateurs, comment ne pas se poser une fois de plus la question ? La mission de l’ONU pour le Congo a été créée en 1999. Vingt et un ans de présence dans les provinces de l’est, vingt et un ans de violence, de cruauté. On y est assassin de père en fils ! On suppose que le métier permet d’épargner pour ses vieux jours sinon les nouvelles générations seraient devenues médecins, infirmières, profs ou commerçants, voire politiciens, plutôt que tueurs comme papa. Hélas, le magnifique docteur Mukwege, prix Nobel de la paix, « l’homme qui répare les femmes », n’est pas prêt de prendre sa retraite. 

Pendant ce temps, les génocidaires hutus rwandais qui ont pu s’enfuir au Congo avec armes et bagages, avec la complicité des autorités françaises de l’époque (président socialiste et ministre des affaires étrangères de droite, en union sacrée comme le soulignait récemment Colette Braeckman) ont implanté un empire basé sur la terreur sans que les braves troufions en casques bleus n’aient manifestement entrepris ni surtout réussi quoi que ce soit qui mette fin à ce cercle infernal. 

Ce qui rappelle d’autres horreurs que les « missions » de l’ONU ont préféré ne pas regarder. Le génocide des tutsis, abandonnés à leur triste sort (autant que les militaires belges chargés de protéger la première ministre, tous tués comme elle). Quand on commence à se tirer dessus, les casques bleus se rappellent généralement qu’ils ont autre chose à faire que de s’interposer, le plus souvent faire leur barda… 

Au même moment, d’autres civils se faisaient massacrer en ex-Yougoslavie. Avec en point d’orgue, Srebrenica en juillet 1995 (qualifié de génocide par le TPI, lors du procès du général Mladic). Cette fois encore, les troupes de l’ONU se sont battus pour ne pas éviter les massacres, les casques bleus hollandais sur place allant jusqu’à aimablement aider les Serbes à séparer femmes et hommes et à indiquer les refuges de certains habitants (les tribunaux hollandais ont condamné les Pays-Bas depuis). Quant à l’état-major, dirigé par le général français Janvier, il a refusé tout appui aérien à ses casques bleus, ce qui aurait permis sans doute de bloquer l’avance serbe, à la suite d’un accord conclu avec Mladic ! 

Les envoyés de l’ONU ne travaillent qu’à assurer le fonctionnement de la machine de l’organisation internationale dans un mouvement perpétuel qui laisse sur le côté tous autres que les fonctionnaires de l’ONU. 

Ne remontons pas plus dans le temps, on trouverait à chaque envoi de casques bleus la même impuissance, parfois la même complicité. 

Peut-être qu’il faudrait en tirer enfin une leçon simple : faire la guerre et surtout rétablir la paix sont des activités trop sérieuses pour les laisser aux soldats habillés de bleu par l’ONU. 

www.berenboom.com

UN EXCELLENT CALMENT

Le mot de l’hiver dernier était « vortex ». Personne n’en a vraiment compris la signification mais comme Vortex évoque pour les uns le nom d’un horrible espion russe dans un film de super-héros et pour les autres une substance explosive fort appréciée des terroristes, on a saisi que le vortex n’annonçait rien de bon. En effet, les frimas de février dernier ont donné un avant-goût de la glaciation qui nous attend lorsque le gulf-stream prendra le large.
Cet hiver, le nom en vedette, c’est Jeanne Calment.
Jusqu’ici la doyenne des Françaises – morte à l’âge de 120 ans il y a quelques années – renvoyait l’image de la France éternelle, quelque part entre le paysage tranquille de la campagne avec fond de clocher et braves paysans « de chez nous » et les pubs de la mère Denis (une autre mamie qui avait connu le succès dans des clips de machines à laver, en répétant « c’est bien vrai, ça » exemple de la sagesse du bon peuple d’en-bas).
Mais, patatras, voilà qu’on subodore que la mère Calment n’est pas la mère calmée mais sa fille. Qui aurait pris la place de sa maman pour continuer à percevoir sa pension.
Est-ce vraiment une coïncidence si cette bombe explose au moment où cette même France d’en-bas, dont elle était le symbole, s’est mise à contester chaque samedi les institutions et les fondamentaux du système politique de nos voisins ? Il n’y a donc plus rien qui tienne debout dans l’Hexagone si même cette icône qui ramenait une bouffée du bon temps de jadis pour apaiser les tourments d’aujourd’hui se révèle une contrefaçon.
Chez nous, les choses commencent aussi à sentir le roussi. Notre Jeanne Calment à nous s’appelle Didier Reynders. Un homme qui a connu la Belgique d’avant la N-VA. D’avant même la troisième réforme de l’état ! Il s’en va lui aussi chercher le calme ailleurs. Mais en nous laissant un message paradoxal.
D’une part, il nous abandonne, dit-il, pour Strasbourg et le Conseil de l’Europe. De l’autre, il annonce que les libéraux de Bruxelles peuvent compter sur lui et qu’il va les mener, drapeau au vent.
On sait que l’homme a plusieurs tours dans son sac. Et des cartes plein les manches. Mais comment va-t-il à la fois vivre dans les deux capitales de l’Europe ? Chargera-t-il un faux Reynders de diriger Bruxelles ? Va-t-il se faire représenter à Strasbourg par un clone ? Une doublure ? Laurette Onkelinx justement a du loisir. Et, si ça se trouve, un goût pour le travesti. Ou Daniel Bacquelaine qui doit en avoir plein les bottes de la pension à poings (dans la figure).
A moins qu’il ne fasse appel à la technologie moderne, dont s’était déjà servi Jean-Luc Mélenchon pour animer des débats simultanés dans plusieurs villes françaises ?
2019, on le voit, commence sur les chapeaux de roue. Sûr que c’est une année où l’on va s’amuser…

www.berenboom.com

ATOMIC-MAC

La bonne nouvelle de la semaine : le Luxembourg déversera ses déchets nucléaires chez nous mais il gardera ses banques et les économies de nos épargnants. C’est ce que l’on appelle un accord gagnant-gagnant.

Reste à décider ce que nous allons faire des déchets nucléaires de nos amis grand-ducaux, de simples zakouskis, il est vrai, comparés à ceux de nos « propres » productions locales.

Alors secrétaire d’état, l’écolo Olivier Deleuze annonçait en 2003 le début de la fin du nucléaire pour 2015, promesse que les partis libéraux et le PS se sont empressés d’oublier dès la fonte des verts aux élections suivantes.

En 2012, le ministre Wathelet l’annonçait pour 2025, ce qu’a confirmé l’actuel gouvernement il y a quelques mois. Sauf que la N-VA ne l’entend pas de cette oreille. Et laisse la question ouverte pour en discuter après les élections de l’an prochain. Promesse d’un sérieux court-circuit autour de la prochaine déclaration gouvernementale sinon d’un Fukushima si l’un des futurs partenaires s’entête à mettre l’agenda de la mort du nucléaire sur la table. Autrement dit, on en reparlera après la fin des banquises, la hausse des océans et la disparition de la Flandre.

Pour une fois, l’électrique Bart De Wever pourra invoquer la France (à la tête du lobby nucléaire chez nous) plutôt que l’Allemagne (qui s’en est débarrassé calmement). Avec l’entrée en fonction du nouveau ministre de l’écologie, le président Macron s’est assuré un collaborateur peinard question centrale nucléaire, le totem intouchable des Français avec l’industrie de l’armement et celle du foie gras.

Quand il s’opposait au candidat Macron, François de Rugy, s’est engagé à la fin des centrales françaises pour 2040. Depuis qu’il est ministre, il s’est engagé à la fermer sur la question.

Personne ne connaît la durée pendant laquelle les matières resteront radioactives : des siècles ou des centaines de milliers d’années, comme le disent certains ? Bref, on ne sait rien, on n’a aucune solution, celles qui ont été expérimentées ont fait eau de toute part (comme le déversement de déchets en mer principalement par les Anglais dans les années 50 qui prétendaient qu’ils allaient se dissoudre comme du savon ou par les Italiens au large de la Somalie avec l’aide des Maffias).

Que ces crasses mettent cinquante mille ou trois cent mille ans à cesser d’être nocives n’a pas beaucoup d’importance puisque les mammifères intelligents auront disparu de la surface de la planète depuis longtemps, tués par d’autres crasses.

Resté seul, Bart De Wever pourra lancer aux êtres survivants : « Abyssus abyssum invocat » (« l’abîme appelle l’abîme »).

« Acta est fabula ! » (« La pièce est finie ! ») répondront ses auditeurs en suçant une glace au plutonium.

www.berenboom.com

A TABLE !

Quelle sera la grande affaire de ce week-end ? Pour les uns, les festivals de jazz de Liège et de Liberchies. Pour les autres, la composition du premier gouvernement Macron. Tout Paris bruisse de rumeurs contradictoires. Et le café du commerce fait le plein. Dès qu’un homme ou une femme politique annonce ces jours-ci qu’il envisage un nouveau plan de carrière, paf !, on lui colle un ministère. Le maire de Nice, Christian Estrosi n’a pas eu le temps de démissionner de la présidence de sa région qu’il est bombardé par les medias ministre d’état. Et Marion Maréchal-Le Pen, très en froid avec la Marine française, pourquoi lâche-t-elle le FN ? Pour un secrétariat d’état ? Aux Anciens combattants, peut-être ?

Le président Macron, qui n’a pas fini de nous étonner, a bien d’autres idées explosives dans son sac à malices. Plus audacieuses que le reclassement de quelques politiciens en déshérence.

Pour former son équipe, au lieu de picorer comme d’habitude parmi les vieux birbes socialistes et Républicains, il voit large, bien au-delà des étroites frontières hexagonales : il envisage de nommer ministres français quelques-uns des plus charismatiques dirigeants des autres pays européens. De quoi mettre d’avance ses partenaires dans la poche et prendre à revers une opinion publique française d’avance indocile.

D’après ce qu’on sait, son casting pourrait rassembler Mario Renzi aux relations avec le parlement, un spécialiste pour déclencher une zizanie permanente entre tous les partis représentés à l’assemblée nationale. Angela Merkel à la Coopération au Développement gérera la question des réfugiés en conservant la confiance de l’opinion publique. Et Jarosław Kaczyński sera aux Affaires étrangères pour être certain de se fâcher avec le reste de la planète.

Jean-Claude Juncker, pressenti aux Finances, a promis d’apporter au nouveau président tous les secrets et ficelles permettant à la France de devenir un paradis fiscal aussi intouchable que le Luxembourg. Et le Hongrois Orban, le mode d’emploi pour fabriquer un état fort où opposition et institutions seront muselées pendant des années avec l’appui enthousiaste des citoyens.

Reste le casse-tête belge. Qui choisir parmi l’élite de notre nation ? Car il n’y a qu’une place pour notre pays. Charles Michel, Bart De Wever, Paul Magnette, Stéphane Moreau ?

De Wever l’intéresse. Il a réussi comme lui à s’emparer en deux coups de cuillère à pot de l’appareil d’état mais il met comme condition à sa participation, le rattachement de Lille à la Flandre. Charles Michel hésite. Il ne peut décider qu’avec l’approbation unanime des sept parlements du pays. Finalement, Macron a choisi Raoul Hedebouw. Il aura ainsi son mini-Mélenchon.

www.berenboom.com