TU VEUX MA PHOTO ?

 Entre les suicides d’ados persécutés et filmés par leurs « copains » sur Facebook et les terroristes s’exhibant avant, pendant ou après leurs méfaits sur You Tube ou Instagram, on ne sait plus où donner de la tête surtout que, pendant ce temps-là, se répandent des millions de messages haineux, montages tronqués et fausses informations auxquels s’ajoutent des commentaires qu’on appelait jadis le blabla du café du commerce. A cette différence qu’au café, on pouvait regarder dans les yeux l’interlocuteur qui balançait des conneries et lui mettre le poing sur le nez alors que dans le bistrot virtuel, ce sont des anonymes-pseudonymes qui lèvent leur verre virtuel en déversant leur fiel impunément.

Au café du commerce, quand il en avait marre de vous entendre pérorer, le patron vous flanquait à la porte. Les boss de X, Tik Tok et autres Facebook n’ont pas ce réflexe. Ils ne vous entendent pas. Ils ne regardent pas ce qui défile sur leurs écrans, sinon les pubs. Car elles représentent leur seule préoccupation, le fric qui tombe dans leur escarcelle. Plus il y a de followers, plus il y a des dollars. Peu importe ce qui produit leurs revenus. 

Il n’est pas certain qu’avoir placé un appareil photo sur chaque téléphone marque un grand progrès dans l’histoire de la civilisation mais ce qui est sûr c’est que laisser se répandre les horreurs des réseaux sociaux sans filets constitue un crime contre l’humanité. 

Certains crient à la censure quand des voix s’élèvent réclamant aux réseaux sociaux de modérer les contenus, bloquer les horreurs et les monstres, responsabiliser les auteurs des messages en les obligeant à apparaître sous leur véritable identité. 

Journaux, radios, télés, tous les organes classiques d’information ont placé depuis toujours des filtres, vérifient ce qui est publié. Des éditeurs relisent ou visionnent avant de laisser publier. Y a-t-on jamais vu une atteinte à la liberté d’expression ? Au contraire. 

Laisser se répandre des fakes news, des éloges de la terreur, la barbarie mise en scène, voilà des atteintes à la liberté des citoyens. Imposer l’image d’enfants égorgés ou laisser un terroriste se filmer lui-même (et toujours de façon médiocre sans le moindre talent !) en train de canarder des civils, où est la liberté ?

Au contraire, cette diffusion en flots continus d’images et de textes dégueulasses est une façon d’étouffer le spectateur sous le déluge d’horreurs. L’empêcher de réagir par l’intelligence. Ce qui est l’essence même de la communication.

Comme le relevait Michaël Crichton, dans la société de l’information, personne ne pense. Nous pensions bannir le papier. Mais en fait nous avons banni la pensée.    

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REMEDE A L’INCERTITUDE

 Regardez les exploits de l’industrie spatiale. Des sondes vers Jupiter qui tournent autour de ses satellites pour chercher des traces de vie, une autre jusqu’à Pluton, aux confins du système solaire. Des robots posés en douceur sur des astéroïdes. Les scientifiques ont aussi découvert que la matière noire et l’énergie sombre occupent 95 % de l’univers. Ce qui me fait penser à profiter du soleil avant qu’une nuit définitive ne nous tombe dessus…

En quelques années, la technologie a donné accès à plus de connaissances que pendant les deux cent mille premières années de l’homo sapiens. 

Mais, paradoxalement, plus les appareils sont sophistiqués et les découvertes scientifiques bouleversantes, plus l’homme se trouve plongé en plein désarroi. C’était si simple de comprendre les lois de la physique à l’époque de Newton : il suffisait de s’asseoir sous un arbre en attendant de recevoir une pomme sur la tête. De lire la Bible ou le Coran pour avoir une explication rassurante de notre présence dans l’univers. 

Maintenant, plus on accède à des découvertes, moins on les comprend. Et on a peur. La multiplication des ouragans et des inondations est-elle une conséquence du dérèglement climatique ? La pandémie du coronavirus le résultat d’une manipulation malheureuse de virus en laboratoire ? Et comment reste-t-on aussi désarmé face à un bête virus alors qu’on peut envoyer des engins au fond de l’univers, qu’on est capable de décoder les premières minutes qui ont suivi le Big Bang ?  

Dans ce monde de plus en plus instable et incompréhensible, beaucoup ont besoin désespérément d’entendre des raisonnements élémentaires. Des fake news tellement plus crédibles que les vraies. Des théories complotistes qui rendent les événements troublants si faciles à analyser. L’homme n’a jamais réussi à débarquer sur la lune, c’est Hollywood qui a fabriqué les images. Le World Trade Center ne s’est pas effondré. L’événement a eu lieu dans une autre dimension. Les terroristes n’existent pas. C’est une invention des communistes. Hitler est toujours vivant. Il attend son heure. 

  La ferveur de tant d’électeurs pour garder Trump à la Maison Blanche s’explique aussi par l’angoisse devant l’incertitude. 

  Bien sûr, sa gestion de la pandémie est à l’image de ses discours, grotesques, brouillons, mensongers. C’est justement là d’où il tire sa force. Quel avenir avec Biden ? Des années de grisaille, de crise et une gestion ennuyeuse des affaires. 

Les électeurs de Trump savent que le virus ne sera pas vaincu. Mais ils s’en fichent. Avec sa baguette magique, Mister America First offre l’illusion, pas la réalité. Et c’est ce que veulent ses partisans, des lendemains aussi brillants qu’un cabriolet Mustang 1968 tout neuf aux jantes chromées fonçant sur la US Route 66 en direction de Santa Monica. 

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LES CONQUERANTS DU NOUVEAU MONDE

On nous répète sans cesse que nous sommes passés dans le « nouveau monde ». Adieu, l’ancien. Tout va changer. Cette semaine, un incident illustre la différence entre les deux mondes. Dans l’ancien monde, lorsque vous confiiez vos économies à une banque, elle vous payait des intérêts. Maintenant, c’est vous qui payez pour récupérer votre argent.
Dans l’ancien monde, votre femme préparait la viande de mammouth que vous aviez ramenée à la caverne. Dans le nouveau, vous partagez avec votre copine les graines que vous avez récoltées dans votre jardin.
Barack Obama, voilà, paraît-il, un personnage de l’ancien monde. Le nouveau, c’est Donald Trump. Vous saisissez comment le nouveau monde a permis à l’humanité de faire un grand pas vers la civilisation et de s’éloigner de la barbarie ?
Jadis, nos parents avaient aussi cherché à distinguer leur ancien monde du nouveau. L’ancien, c’était Fred Astaire, le nouveau, Gene Kelly. L’ancien, la première guerre mondiale. Le nouveau, la seconde. L’ancien, les camps de la mort; le nouveau, la bombe atomique…
Aujourd’hui, même les classiques sont classés de façon différente selon le monde auquel on appartient. La Bible, c’est l’ancien monde (même le Nouveau Testament). Le Coran, le nouveau. Oui, je sais, c’est compliqué.
Rocky, l’ancien monde. Transformers, le nouveau.
Kabila, l’ancien monde. Tshisekedi, le nouveau. Où est l’erreur ?
Autre exemple. Le Soir, c’est l’ancien monde. Les sites de fake news, le nouveau.
Charles Michel-Bart De Wever, l’ancien monde. Charles Michel-Ecolo/Groen, le nouveau.
Dans l’ancien monde, le peuple était souverain. Dans le nouveau, les citoyens ont le pouvoir. Je suppose que ça fait une différence. En tout cas, ça fait du bien de crier en rue quand il fait aussi froid.
A ce propos, les gilets jaunes, c’est le nouveau monde. Mais qu’il a l’air ancien !
Dans l’ancien monde, beaucoup de citoyens se sont battus contre le travail des enfants chez nous. Dans le nouveau, nous nous réjouissons que le prix des pulls et des smartphones venus d’extrême orient soit si bas…
Dans l’ancien monde, l’idée de l’Europe était symbolisée par des gens comme Stefan Zweig, Roger Martin du Gard, Einstein, Churchill, Schuman ou Angela Merkel. Les Européens du nouveau monde s’appellent Orban, Salvini, Houellebecq ou Juncker. Au secours !
Dans l’ancien monde, Tintin partait pour la Lune, accomplissant le rêve séculaire de l’homme. Dans le nouveau, la Belgique et le Luxembourg ont signé une convention pour l’exploitation des ressources minières de l’espace.
Dans l’ancien monde, on partait en pique-nique à la campagne, en essayant de protéger les sandwiches des insectes. Dans le nouveau, on expliquera à nos petits-enfants à quoi ressemblaient les abeilles, les oiseaux et les fleurs.

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FAKE NEWS FROM BRUSSELS

Dernier Tweet du président Trump cette nuit: « Si Theo Francken me rejoint à Washington, il trouvera à sa descente d’avion tapis rouge et carte verte. »

Bart De Wever se frotte les yeux. Charles Michel se frotte les mains. Quelle mouche a piqué la Maison Blanche ?

La vérité est que le président américain, qui commence à comprendre qu’il n’est plus en campagne et qu’il a bel et bien été élu, ne sait plus où donner de la tête. Wall Street est en chute libre, l’inflation reprend du poil de la bête, le mur de séparation avec le Mexique est impossible à financer, les administrations fédérales à l’arrêt faute de budget, et personne ne l’aime – c’est le plus dur pour ce grand sentimental. Même ses plus ridicules ennemis le narguent sans qu’il puisse réagir, comme le président coréen qu’il doit se contenter de traiter de « petit gros » au lieu de lui envoyer une bonne bombe sur la tronche. Mais pas moyen de rire un peu avec les généraux américains. Plus ils ont des médailles, plus ils sont pleutres.

De plus, Trump n’a plus aucune confiance dans ses conseillers qui tombent comme des mouches quand ils ne sont pas inculpés par le procureur fédéral. Où va-t-on ?

Ailleurs. En Belgique. D’où il veut exfiltrer l’homme providentiel, le seul qui peut encore lui sauver la mise. Théo F., le politicien qui n’hésite pas à dire ce qu’il pense des immigrés et à faire tout ce qu’il dit ou plutôt qu’il grogne entre ses dents pour s’en débarrasser.

« Viens, mon Théo. Tu verras, à nous deux, ce sera la guerre des étoiles ! (Les étoiles, c’est toi et moi). » Ce dernier Tweet semble avoir été envoyé à une heure tardive après une soirée bien arrosée. « Lâche-moi la main, Melania, il me faut tapoter un petit dernier avant les plumes. »

Pour Théo, la tentation est grande. Mettre en œuvre la politique qu’il rêve de mener en Belgique mais puissance mille. Et sans toute cette bande de chipoteurs qui de Liège à Courtrai l’empêche de déployer les grands moyens. Et on ne touche pas aux enfants, et on n’enferme pas les familles, et on faire des mamours aux Soudanais et on trouve des juges pour lui chercher des poux et avec les collègues, c’est la galère, les libéraux qui peut-être bien que oui, peut-être bien que non et les chrétiens démocrates qui temporisent.

Avec Trump, fini tout ça ! Les mains libres, les manches retroussées et au travail, la bave aux lèvres ! Et des milliers d’Américains, une bière à la main, qui vont l’applaudir au passage quand il reconduira les Chicanos dans leurs déserts. On appellera ça Le Convoi Francken ; ça fait très Hollywood ! Des dizaines de milliers de Latinos avec leurs chicos et adios ! Et, au bout de quelques mois, on se retrouvera entre gringos !

Après ça, les Belges vont enfin l’admirer, le Théo. On n’est jamais prophète en son pays.

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