LES CAHIERS AU FEU ET ELIO AU MILIEU !

   Pourquoi la popularité du Premier ministre est-elle en chute libre dans les sondages, se lamentent ses amis, après seulement un an de pouvoir ? N’a-t-il pas réussi à sortir le pays de sa pire crise politique depuis la question royale ? A boucler l’impossible scission de BHV qui empoisonnait les relations entre les communautés depuis cinquante sans que personne ne descende dans les rues ? A réformer le chômage, les pensions ? A serrer la ceinture du budget fédéral c’est-à-dire à piquer dans notre portefeuille un montant inédit de près de vingt milliards sans trop de grogne ? Et même à mieux parler flamand que Michel Daerden ? Est-ce ainsi qu’on accueille Hercule au retour de ses grands travaux ?

Ben oui. En ces temps de banqueroute de la Grèce, mieux vaut ne pas invoquer ses héros même antiques. Vu ce que les Grecs ont fait du pognon européen, les autres membres de l’union en ont marre de se laisser manger l’Hellène sur le dos.

Mais surtout, Elio souffre d’un mal qui frappe tout le personnel politique, de François Hollande à Sarkozy et Berlusconi, et qui a même failli emporter Obama. Quoi qu’ils fassent, les gens ne croient plus à leurs dirigeants. Ils ont trop dit et pas agi. Et même s’ils tentent de mettre maintenant la main à la pâte, c’est trop tard. On a l’impression qu’ils font du sur place, qu’ils remuent du vent, pédalent dans la choucroute. Tout juste bons à fêter la centenaire de la commune. Mais pas à donner du travail à ses petits-enfants. Ni de l’espoir à leurs enfants.

Que les hommes et femmes politiques ne nous prennent pas pour des ingrats. Ils sont les premiers responsables de leur désamour. Depuis le début de la crise, ils ont tant répété qu’ils ne sont responsables de rien, qu’on a fini par les croire. C’est la faute à l’Europe, aux banques, aux Chinois, aux multinationales, à M. Mittal, à l’euro, aux Wallons, aux Flamands, au père Fouettard, à saint Nicolas, aux Incas et à leur fichu calendrier !

En présentant il y a quelques jours leur manifeste pour l’Europe, Guy Verhofstadt et Daniel Cohn-Bendit (duo improbable sinon absurde) ont suscité un enthousiasme insolite pour un show politique. Qu’ont donc soutenu de si sensationnel les deux compères bleu-vert au point de chauffer la salle comme une baraque à frites? Qu’il est temps que les hommes politiques reprennent la barre, abandonnent leur tentation de ne plus gérer que leur région, leur village, pour s’atteler à un projet qui réunisse tout le continent et le transforme.

Au moment même où Maurice Lippens confessait qu’il n’a jamais eu les compétences pour gérer une banque, il était rafraîchissant d’en entendre d’autres qui veulent enfin bousculer les imposteurs, les ternes, les timides et les médiocres. L’imagination au pouvoir…

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LA CHARIA : VERSION BHL OU BHV ?

Qui ne se réjouira d’entendre dans son premier discours à Tripoli, le président du Conseil national de transition libyen remettre enfin l’église au milieu du village ou plutôt le muezzin au sommet de son phare ?

« L’islam sera la principale source de la législation dans la nouvelle Libye », a déclaré le président Abdeljalil  devant des milliers de Libyens réunis sur la Place des martyrs.

Ouf ! On en avait assez de voir déferler sur toutes les télévisions occidentales ces jeunes gens imberbes et ces jeunes filles en mini-jupes, têtes nues (et le reste pas très caché), proclamant leur bonheur d’être libres et aspirant à vivre comme nous. Droits de l’Homme, égalité hommes-femmes et autres gadgets ? Taratata ! Qui pense qu’on est en Libye pour rigoler ?

Les contrats pétroliers seront peut-être soumis à la loi du pays le plus offrant. Mais pour la population indigène, une seule loi, la charia !

La Cour européenne des droits de l’homme a beau avoir remarqué dans un arrêt de 2001 que « les déclarations qui contiennent des références explicites à l’instauration de la Charia sont difficilement compatibles avec les principes fondamentaux de la démocratie, tels qu’ils résultent de la Convention européenne des droits de l’homme » et qu’il est « difficile à la fois de se déclarer respectueux de la démocratie et des droits de l’homme et de soutenir un régime fondé sur la Charia, qui se démarque nettement des valeurs de la Convention », la Libye, que je sache, n’est pas liée par la Convention européenne des droits de l’homme.

Les pays qui se sont empressés de « protéger » la population libyenne et les révolutionnaires à présent au pouvoir, si, remarquez. Ils ont bonne mine.

On ajoutera qu’une fois la charia instaurée (ou plutôt rétablie car le précédent dictateur l’avait déjà proclamée), vaut mieux que Bernard Henri-Lévy rencontre ses « amis » du CNT au bar de l’hôtel Lutetia…

Reste aux Occidentaux, pour ne pas perdre la face, à envoyer auprès des nouveaux boss libyens un négociateur-inspirateur-démineur capable de faire croire aux uns que la loi islamique est proclamée et aux autres que c’est la démocratie qui règne désormais au pays du Guide suprême. Ca tombe bien, les complications institutionnelles et réciproquement le contraire, c’est notre spécialité. Dans le lot, on a justement un spécialiste sous la main dont on  ne sait plus que faire. Yves Leterme. Cinq minutes de courage politique et la charia libyenne ressemblera à la constitution belge comme deux gouttes d’eau. En appliquant le mécanisme de BHV mis au point par Elio Di Rupo, réécrit par Wouter Beke et expliqué par Charles Michel, les Libyens pourront faire passer une burqa pour un monokini et une fatwa pour une gaufre de Liège.

 

 

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GAME OVER

Que faire perdu dans un aéroport lointain, prisonnier d’une valise de vingt kilos, en compagnie de deux enfants et d’un couple d’amis ? Des amis ? Disons de vagues relations avec lesquels, après un dîner sympathique, on s’est embarqué sans réfléchir pour sept jours all inclusive –on nage ensemble, on mange ensemble, on dort ensemble et on parle ensemble même quand on n’a rien à se dire, juste comme autour de la table de Leterme. Une semaine à faire semblant -on est civilisé- à tenir bon en décomptant les jours, les heures. Soudain, la délivrance ! Taxi, en route vers l’aéroport ! On se revoit à Bruxelles ? Très vite ! Promis ! Et soudain, en arrivant dans le hall au milieu d’une foule en folie, on apprend que ces amis, on est collé à eux pour des heures, des jours, des mois, peut-être pour le restant de notre vie.
Nous n’avons jamais réussi à atteindre le comptoir de la compagnie. Six cent voyageurs forment un rempart autrement efficace que la défense du Standard.
Les hôtels pris d’assaut, bus et voitures introuvables. Saigon, la veille de l’entrée des troupes communistes.
C’est alors que nos excellents amis ont imaginé un jeu : le premier qui dénoue le casse-tête de B.H.V. a gagné. La meilleure rédaction sera envoyée par mail au roi et aux gamins qui commencent à fatiguer. C’est pas comme nous, ils ne reviennent pas de vacances.
On s’y est tous mis. Y compris les enfants. Mes amis m’ont épaté, je l’avoue. Pendant que des milliers de Belges s’égosillaient égoïstement à écraser leurs voisins pour embarquer les premiers pour Zaventem (arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde, soit dit en passant), nous, on se dévouait pour la chose publique.
Moi, j’avais élaboré un projet qui faisait de Bruxelles-national (propriété d’une société australienne) et de Brussels south (sous la dictature d’un Irlandais) une entité nouvelle où l’on ne parlerait qu’anglais (le reflet de la situation sur le terrain) et dont la tutelle serait exercée par deux gouverneurs, nommés par Canberra et Dublin. Les enfants ont imaginé de rattacher les six communes à facilités à Plopsaland (version originale flamande mais avec sous-titres français). Ma femme a suggéré de défiscaliser les magasins de luxe du Brabant flamand en échange de l’abandon des facilités.
Nous étions assez fiers de nous quand nous nous sommes aperçus qu’un autre passager, qui avait observé le résultat de nos cogitations au-dessus de nos épaules, a soudain renoncé à attendre son vol pour rejoindre Bruxelles au plus vite. J’ai cru reconnaître Alexander De Croo. L’air drôlement pressé. Et incroyablement inquiet. Eh, monsieur De Croo ! Ce n’était qu’un jeu ! Alexander, reviens, ils vont te rendre fou ! Trop tard. Il avait déjà disparu.

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