La « belle harmonie », le nom de la nouvelle ère nippone sonne comme la fanfare de Moulinsart ! Allez, santé ! Les Japonais s’y connaissent en airs qui soulèvent les peuples. L’intronisation de l’empereur Naruhito annonce, parait-il, une nouvelle ére de paix.
Soyons prudents. En matière d’ère, les comiques ne connaissent qu’une réplique, éculée : « dans quel état, j’erre ». Et ceux qui ont de la mémoire se souviennent avec effroi du règne de l’empereur Hiro-Hito, le grand-père du nouveau Mikado qui avait mené le pays à la deuxième guerre mondiale, aux invasions, aux atrocités et aux massacres. Son ère à lui s’appelait l’ère de « la paix éclairée ». Ce qui laisse penser qu’au Japon, c’est comme chez nous, les slogans politiques peuvent être dangereusement trompeurs.
Reste que le nouvel empereur n’a aucun pouvoir politique et qu’il a une tête sympathique !
Il ne faut pas se cacher que changer d’ère fait toujours plaisir. C’est la mode, ces derniers temps. Chez nos voisins français, on est passé, l’air de rien, du vieux monde au nouveau. Sans qu’on sache très bien qui est neuf et qui est lessivé. Nettoyer à chaque élection nos assemblées parlementaires et les vider de leurs vieux abonnés, donne l’illusion, pendant un certain temps, d’une grande bouffée d’air frais.
Mais c’est fou ce que les nouvelles têtes (à claques) se mettent vite à ressembler aux anciennes.
Votre quotidien favori a calculé qu’aux prochaines élections fédérales, vous découvrirez plus de 72 % de nouvelles binettes sur les listes des partis francophones.
Il y a deux ans, après la victoire d’Emmanuel Macron, l’assemblée nationale française a été complètement renouvelée avec une majorité de nouveaux élus venus de la « société civile ». Depuis, la France n’a jamais connu une telle révolte de cette même société civile ! Méfions-nous donc du mirage des changements d’ère. Ils peuvent se transformer en courants d’air. Et les refroidissements finissent parfois par être fatals.
Ce qui justifie le succès des mesures pour renforcer l’isolation. Maggie De Block l’a bien compris en chargeant l’Office des étrangers d’isoler les maisons unifamiliales du Centre 127 bis, façon de contourner l’arrêt du Conseil d’état qui interdisait d’y enfermer des enfants, exposés à la pollution sonore de l’aéroport de Zaventem. Ce qui illustre la célèbre formule du Guépard de Lampedusa : « Tout changer pour que tout reste pareil ». Vous avez dit changement d’ère ?
PS : Pensée émue pour Serge Moureaux, disparu cette semaine. Un exemple d’intégrité politique, de force de conviction. Un homme qui croyait que la politique peut déplacer les montagnes et qui l’a parfois prouvé, notamment au service de l’indépendance de l’Algérie mais plus tard aussi à l’agglomération de Bruxelles.