ANNUS MIRABILIS

On ne l’entend jamais quand ça va mal. Mais, dès que reviennent les hirondelles, le président de l’Europe montre le bout de son nez.

Faut croire que le printemps n’est pas loin puisque notre ex-furtif premier ministre sort de son long silence pour annoncer, devant les parlementaires européens ébahis, que 2011 était une « annus mirabilis ». Pour ceux qui en ont avalé leur latin, l’annus en question désigne l’année et mirabilis veut dire « miraculeuse » et non misérable comme l’aurait cru le vulgum pecus.

Des millions de travailleurs en Europe sans emploi et pour une partie d’entre eux sans aides publiques, l’effondrement de l’euro, auxquels s’ajoute une abominable contagion de tueurs en série de Liège à Oslo, voilà ce que M. Van Rompuy qualifie d’événements miraculeux ?

Dans plusieurs religions, il est vrai, le déclenchement de cataclysmes annonce la fin du monde. Une fin catastrophique pour les uns, heureuse pour les autres, comme dans la religion juive où l’apocalypse précède l’arrivée du messie, censé apporter la paix sur terre.

Est-ce à cette prophétie qu’a faite allusion Zen Herman à Strasbourg ? La connaissance de la mystique juive ne faisait pas jusqu’ici partie des innombrables lumières du plus haïku des hommes politiques.

Alors, de quel miracle parlait-il ?

De l’arrivée de la démocratie « à l’occidentale » dans des pays jusqu’ici connus pour leur système musclé ? Comme la Russie ou le Congo. Mais, les élections récentes de Kabila et des copains de Poutine ressemblent plutôt à un cauchemar qu’aux promesses de liberté que les Européens ont vendu aux citoyens russes et congolais comme le remède à tous leurs maux. Et les premières élections des ex-dictatures arabes exhalent elles aussi un parfum inquiétant.

Faut-il penser que notre Herman chéri est resté trop longtemps dans le bunker où, depuis son élection, Sarkozy et Merkel l’avaient enfermé, ligoté et bâillonné ? Ou a-t-il passé son temps à fumer la carpette de son abri ce qui explique pourquoi, depuis le nuage sur lequel il est perché, il ne voit que du rose : son salaire mensuel, sa réélection qui se profile sans souci dans l’annus qui vient, la fin très provisoire des nuits de négociation fédérale en Belgique, la montée irrésistible dans les sondages de la N-VA, la traversée du désert de Michel Daerden (ou Daerden au pays de la soif), le succès de Tintin au cinéma, l’autorisation donnée par le gouvernement au prince Laurent de voyager dans le sultanat d’Oman, tous événements que l’on peut en effet qualifier de miraculeux.

Où l’ont voit qu’on a eu tort de laisser ce docteur-miracle quitter notre pays où il aurait dirigé un gouvernement de bonnes nouvelles au lieu d’un premier ministre qui ne nous promet que du sang et des larmes.

 

 

www.berenboom.com

ELIO, FAIS-MOI UN DESSEIN!

Le nouveau premier ministre, qui est aussi le premier patron de gauche du pays depuis des lunes a posé d’emblée deux actes symboliques.

Abandonnant sa fonction de président du parti, il a adoubé comme nouveau boss un certain Thierry G. Thierry who ?

En nommant cet apparent brave homme, Elio Di Rupo a-t-il voulu relancer la gauche en Wallonie ?

S’il faut en croire son propre site, l’activité de député de Thierry Giet a été la suivante : une proposition de loi visant à déclarer valables certains contrats de jeux de hasard, une autre pour modifier la loi relative aux décimes additionnels sur les amendes pénales. Et une proposition de modification de l’arrêté royal portant règlement général sur la police de la circulation routière et de l’usage de la voie publique en ce qui concerne les capitaines de route encadrant les groupes de cyclistes et de motocyclistes.

Oula, camarades ! Lénine, Vandervelde, tremblez dans vos cercueils rouges ! La gauche du vingt et unième siècle se profile à l’horizon du boulevard de l’empereur…

Tout aussi à gauche, la déclaration inaugurale de M. Di Rupo à la Chambre ? Disons qu’on  peut qualifier de gauche trrrès prudente ce résumé consciencieux de l’accord ficelé par l’étrange majorité à géométrie variable qui va nous gouverner. Là où on attendait le souffle de l’histoire, quelques idées nouvelles pour la société de demain ou au moins un peu d’oxygène pour les mois à venir, on a eu droit à un exercice destiné à prouver les qualités de chimiste du docteur Di Rupo : quand on mélange du bleu et de l’orange avec une pincée de vert, absorbée avant la fin de l’opération, ça ne fait jamais du rouge du moins sur cette planète.

Voilà le résultat d’une plongée en apesanteur depuis près de deux ans d’un être humain autour d’une table dont il reste plus grand-chose sinon la langue de bois.

Des promesses ? me direz-vous mais il n’y a pas un sou en caisse. Certes, on n’attend plus les « demain, on rasera gratis » de Bart De Wever ou « avec moi, moins de taxes » de Didier Reynders. Mais un dessein, genre la « nouvelle frontière » de Kennedy qui nous avait promis la Lune.

Justement, la découverte deux jours avant la déclaration gouvernementale d’une nouvelle planète habitable, une espèce de double de la Terre deux fois et demi plus grande, aurait pu booster son discours.

S’inspirant du « Petit Prince » de Saint-Exupéry, il aurait pu nous faire rêver. Nous laisser entrevoir qu’avec Elio 1er, nous découvrirons à quoi ressemble la Belgique sur Kepler-22, le BHV local, la forme des gaufres et le montant des pensions deux fois et demi plus épaisses à 600 années-lumière de chez nous.

Allez, Elio, fais-nous un dessein !

 

 

www.berenboom.com

LES AFFAIRES REPRENNENT

Dans le monde, les bourses jouent au yo-yo. Et en Belgique, les affaires reprennent.

Vous me direz que ce ne sont jamais que les bonnes affaires des PS liégeois et carolo ? Erreur, c’est bien plus que ça : les premiers signes d’une fumée blanche après deux ans de crise. La renaissance d’une région qui gagne. Wallonie, la niaque !

La preuve ? D’abord, si on accuse des mandataires de s’être largement servi dans la caisse (mais ils sont présumés innocents), c’est que la caisse n’était pas vide. Enfin, un effet du plan Marshall ?

Ensuite, il a fallu des années à la justice pour instruire ces affaires, démêler l’écheveau que des dénonciateurs anonymes mais drôlement bien informés leur avaient soigneusement décortiqué, preuve que leurs initiateurs ont déployé des trésors d’ingénérie.

Voilà l’enseignement positif de cette histoire : il existe une science du managing wallon.

Dans les époques primitives, les politiciens se contentaient d’une enveloppe qu’on leur mettait en poche et dont ils dépensaient le contenu en payant en noir l’imprimeur et le traiteur qui préparait le poulet-compote des soirées de campagne. Une fois les menus frais dépensés et quelques amis arrosés, il leur restait à peine de quoi payer les études en révisorat d’entreprises de leur fiston.

Maintenant, les présumés innocents travaillent sur une toute autre échelle : avec sociétés écrans, comptes étrangers et toutes sortes de détours, qui démontrent qu’à l’ère du capitalisme sauvage, les Wallons sont devenus aussi habiles que la plupart des autres peuples de la planète (lesquels sont eux aussi présumés innocents).

Grâce à nos nouveaux politiciens, les services publics et notamment les intercommunales ne servent plus bêtement les citoyens mais ils sont là pour faire de l’argent.

C’est la preuve du dynamisme des jeunes pousses du socialisme wallon. On craignait qu’après la retraite ou la mise à l’écart de leurs glorieux aînés, si hauts en couleurs, les nouveaux politiciens ne soient plus que de tristes bureaucrates, de ternes experts, le nez sur les chiffres toujours plus décevants des affaires du pays, des gagne-petit de la politique qui comptent un à un les sous de leurs concitoyens. Grâce à la justice, on est soulagé que nos nouveaux dirigeants soient aussi audacieux que leurs pairs mais encore plus inventifs.

L’éclatement soudain de ces affaires intervient juste au moment de la formation du nouveau gouvernement. Un complot ? Mais non, le signal de la fin de ce long interrègne de plus de cinq cents jours pendant lesquels la Belgique restait figée : pas de dirigeants, pas de nouveaux impôts, pas de lois scélérates. Mais pas non plus de scandales politico-financiers.

Le signal que, comme le promet la nouvelle équipe, les affaires reprennent et que la crise est finie.

 

www.berenboom.com

 

PETIT SOUCI

Jadis, pour régler « un gros problème », on se retroussait les manches et on essayait d’affronter l’obstacle. Depuis un certain temps, on ne parle plus de gros problèmes. Il n’existe plus de problèmes du tout. Juste des « petits soucis ». Vous ne vous en rendiez peut-être pas compte mais avec l’ère des petits soucis, « tout va bien, madame la marquise. »

Tchernobyl ? C’était une catastrophe. L’explosion de la centrale de Fukushima ? Un petit souci. D’ailleurs, qui sait encore que le réacteur continue de projeter dans l’atmosphère ses émanations empoisonnées et de semer la mort ? Qui a calculé pendant combien d’années la planète va étouffer sous le nuage nippon ? Pas de souci, voyons !

M. Berlusconi a modifié l’arsenal législatif italien pour le mettre à son profit personnel et piller l’état italien ? Qui s’en inquiète ? Oublions ces petits soucis au rythme des soirées bonga-bonga ! Ciel, une inondation ! Du calme ! Ne vous faites pas de cheveux blancs ! Appelons les « spécialistes » pour nettoyer les caves et remettre les tuyaux en place avant de revenir aux affaires quand ils auront rendu les lieux plus ou moins présentables.

La Belgique va être un de ces jours massacrée par les marchés internationaux et les agences de notation ? Pfff ! Petit souci ! Comme se le demandait avec son habituelle pertinence Philippe Moureaux l’autre jour, « d’abord, c’est qui les marchés ? »

Vous avez raison de ne pas vous en faire, Philippe, ils ne se promènent pas dans les rues de Molenbeek. Elles ne sont plus qu’un petit souci depuis que vous en êtes le maïeur.

Comme il n’y a rien de plus grave que les petits soucis dans la hiérarchie des difficultés à résoudre, personne n’a plus rien à craindre désormais. Inconscience ou cynisme ? Mettre la tête sous le sable c’est tellement meilleur que se la taper contre les murs.

Dès lors, si alléger les dettes énormes de l’état, protéger notre système de pension et la sécurité sociale, et discuter du nombre de cylindrés à partir desquelles il faut taxer les voitures de société, c’est à peu près la même chose, juste de « petits soucis » ménagers, il ne faut pas s’étonner que nos brillants dirigeants perdent la tête et nous font tous plonger du nez.

Aux Etats-Unis, tout va bien aussi, madame la marquise. La plus grande économie du monde

est malade mais les députés républicains n’ont qu’une seule préoccupation, l’élection de l’un des leurs l’an prochain, même s’il va régner c’est sur un champ de ruines.

On commence à se demander si le gros problème n’est pas à chercher du côté des dirigeants  politiques. En changeant la façon de gouverner, on n’aurait peut-être plus tant de petits soucis à se mettre sous la dent.

 

 

www.berenboom.com

MARKETMAN

Depuis des mois, les politiciens occidentaux tremblent à la seule invocation de son nom. « Le marché ». Il fait et surtout défait les gouvernements, fait imploser les états, démantèle les lois, transforme en une nuit des dispositifs législatifs que des années de palabres n’avaient pas réussi à faire bouger.

Mais qui est donc ce terrible Superman qui fait plier la planète ?

Superman, la comparaison est idoine. Dans la vie de tous les jours, le célèbre super-héros n’est pas cet extravagant personnage habillé d’oripeaux ridicules et doté de super pouvoirs. Clark – tel est son nom – est juste un brave journaliste myope et un peu maladroit qui se cogne dans les meubles et est incapable de redresser une armoire bancale.

Or, si le monsieur du marché ressemble à Superman, cela signifie qu’il ressemble aussi à Clark.

Le jour, Marketman balaye d’un revers de souris d’ordinateur le chef de la troisième économie d’Europe, oblige le président français à passer week-ends et soirées avec Frau Angela Merkel plutôt qu’à pouponner avec la sublime Carla Bruni, abandonnée seule avec les biberons.

Mais, la nuit, notre super-héros laisse tomber la veste. Il redevient le brave gars, bon voisin, bon père de famille, qui tond le gazon, aide ses enfants à terminer leurs devoirs, chante une berceuse au petit dernier qui a du mal à s’endormir et lit le journal à son épouse pendant qu’elle fait la vaisselle (c’est sa limite : on n’est pas très féministe chez les Marketman, désolé, chères lectrices !)

« Epargne-moi les pages de la Bourse, Marketman ! »

« Bien sûr, dear. Que veux-tu que je te lise ? Un tremblement de terre a ravagé les côtes de… »

« Tais-toi ! Je déteste les histoires horribles ! »

« Alors, les derniers exploits de DSK ? »

« Tu sais que je n’aime pas les histoires sordides, Marketman. Il n’y a vraiment rien d’autre dans ton canard de plus politiquement correct ? »

« Ah, si ! Un nouvel épisode de ton feuilleton préféré, dear. »

« Chouette ! Les aventures de Super-Elio ? C’est vrai, j’adore ! Alors, qu’est-ce que mon super-héros favori a trouvé aujourd’hui ? Les rebondissements qu’il imagine sont toujours plus renversants ! Comment fait-il ? C’est vraiment un super héros ! »

« Un super-héros, lui ? Voyons ! Ses intrigues tournent en rond depuis plus d’un an et demi! » (soupir de Marketman).

Vous vous demandiez pourquoi la Belgique a échappé jusqu’ici aux terribles déflagrations qui ont ravagé ses voisins, pourtant bien plus puissants qu’elle ? Pourquoi les agences de notation n’ont pas dégradé notre note, la même que celle des Etats-Unis ? Pourquoi le marché ne spécule pas sur le défaut de notre pays ?

La réponse est simple : pour plaire à son épouse bien aimée, Marketman ne peut toucher à la Belgique.

Mais, attention, rappelons-nous que souvent femme varie…

LES ETOILES, SO WHAT ?

D’après Shakespeare, « La faute n’est pas dans les étoiles mais en nous ». Répliques fameuse de « Jules César », une de ses innombrables analyses au scalpel du pouvoir.

Mais alors, cet astéroïde qui s’approche de la terre à toutes pompes au risque de la percuter ? Notre faute, comme le reste ? Comme l’économie grecque qui ressemble à cause de nous aux poubelles d’un HLM de la banlieue parisienne, les comptes de la Dexia qui ressemblent au viaduc de Vilvorde vu du du train, le gouvernement italien qui ressemble aux négociateurs fédéraux belges enfermés Dieu sait où apparemment pour l’éternité. Si ça se trouve, ils se sont embarqués dans une capsule spatiale. En route vers l’astéroïde ? Pour l’empêcher de se fracasser sur notre bonne vieille planète ? Pour sacrifier leur vie afin de sauver la nôtre ?

On peut rêver… D’ailleurs,  « nous sommes faits de la même étoffe que les rêves » (toujours Shakespeare). Et, j’imagine, Elio, Wouter, Charles et les autres, itou. Quoique. De temps en temps, on se demande s’ils ne sont pas des extra-terrestres. Déjà qu’ils sont tout verts et que leur parole est à peu près aussi compréhensible et audible que celle des Martiens. Il faut vraiment qu’ils vivent sur une autre planète pour ignorer à ce point ce qui se passe en Belgique, en Europe, dans le monde et même dans notre système solaire.

A propos d’étoiles, il y en a une autre qui va bientôt briller au firmament, celle du champignon atomique que nous préparent, d’après l’agence de l’énergie nucléaire, les fous de Dieu à Téhéran. Et, à en croire leurs déclarations matamoresques, leurs ennemis israéliens.

Qu’on se débarrasse d’un même coup de deux gouvernements insensés, ce n’est pas nous qui allons nous plaindre, nous qui avons réussi à nous en passer depuis un an et demi.

Mais que ces boutefeux fassent le sale boulot de faire sauter la planète à la place de l’astéroïde, juste pour le plaisir de donner raison à Shakespeare, non !

D’ailleurs, comme tout auteur le Barde a dit tout et son contraire. « La faute n’est pas dans les étoiles » a-t-il écrit pour lancer quelques années plus tard, « Ce sont les étoiles, les étoiles là-haut, qui gouvernent notre existence» (Le Roi Lear).
Entre temps, ceux qui vivent quelque part au fond de l’univers, s’ils regardent l’agitation qui règne sur notre petit astre en prime-time sur leur télé juste avant le dîner, ils doivent bien s’amuser et faire exploser l’audimat.

Alain Bereboom

PS : puisqu’on parle de l’état du pouvoir, allez donc voir « L’exercice de l’état », superbe tragi-comédie sur ceux qui nous gouvernent ou ce qu’il en reste, dans une réalisation raffinée et nerveuse de Pierre Schoeller, magnifiquement interprété notamment par Olivier Gourmet et Michel Blanc.

 

LE CERCLE DES VERTUEUX DISPARUS

Il est loin le temps où Allemands, Français et Américains faisaient tourner le monde entre leurs mains comme Chaplin dans « Le Dictateur » faisait sauter une mappemonde entre ses bottes. Désormais, ce sont les Indiens, Chinois et Brésiliens qui donnent le la sur un air de samba, un rythme inattendu pour le couple Sarkozy-Merkel. Deux pauvres danseurs qui s’essoufflent à essayer de suivre l’orchestre et qui réclament vainement un bon vieux slow. Un slow ? Mais qui danse encore le slow ? Vous vous croyez à une fancy-fair dans l’ex-Allemagne de l’est ?

On imagine la tête de Rudyard Kipling contemplant la gloire du nouvel empire indien, lui qui a écrit : « L’Orient est l’Orient, l’Occident est l’Occident. Jamais, ces deux mondes ne se rencontreront. »

La  réflexion de l’auteur du « Livre de la Jungle » s’applique-t-elle aussi à la Grèce, qui s’est toujours vantée d’apporter l’Orient à l’Occident ? Encore une promesse en l’air ?

La plus célèbre danse hellène s’appelle le sirtaki. Elle se danse en cercle, chaque participant s’appuyant sur l’épaule de son voisin. Danser en rond ? Voilà qui n’amusera pas plus le couple franco-allemand que les cadences latino alors qu’il cherche désespérément à briser le cercle infernal dans lequel il est enfermé. Quant à obliger Nicolas Sarkozy à sautiller en cadence, le bras passé sur l’épaule du longissime Papandréou, inutile de lui demander son avis; la réponse à cette consultation sera non. Non à 100 %.

L’Europe pourra-t-elle s’en sortir grâce aux danses modernes ? Mauvais plan. Dans les discothèques d’aujourd’hui, chacun danse seul, sans se préoccuper des autres.

Comment les pays émergents parviennent-ils à attirer les plus belles créatures du lieu alors que les Européens se font vider de la piste un à un ?

A première vue, les danses chinoises et indiennes n’offrent pas beaucoup de possibilités aux danseurs de chez nous.

Chez les Chinois, la danse classique est associée au mime. En faisant semblant d’être heureux, on finit par devenir heureux. Et en faisant semblant d’être riche ? On finit comme les Grecs par obliger les copains à payer les consommations, y compris l’ardoise accumulée depuis quelques années.

La danse indienne est avant tout une technique qui confine à l’acrobatie. La danseuse exécute des mouvements impossibles des bras et des jambes tout en se dandinant tel un serpent sous la flûte de son dompteur. L’art des Indiens est fondé sur la fascination.

Et si c’était ça justement qui nous manquait ? De Gaulle tenait la France sous la fascination de son verbe. Berlusconi séduisait les Italiens en leur promettant la lune. Mais le président européen, Herman qui ? avec quoi va-t-il nous fasciner ?

 

www.berenboom.com

OFFRE D’EMPLOI

Un vent favorable a emmené sur notre bureau cette lettre adressée confidentiellement il y a deux jours par Dominique Strauss-Kahn à Bart De Wever.

 

« Cher Monsieur,

 

De mauvais esprits ont saboté la poursuite de ma carrière en France. Vous avez sans doute appris ma mauvaise fortune. Mon avenir étant définitivement  aussi prometteur que celui de mon camarade Michel Rocard, j’ai songé à entamer une nouvelle vie en Belgique.

Dois-je vous rappeler mes titres et qualités ? J’ai été ministre des finances en France, patron du FMI aux Etats Unis, ce qui m’a emmené à me promener dans le monde entier, les déplacements vers les contrées exotiques ne me font pas peur.

De plus, j’ai compris que votre pays n’a pas encore trouvé mon équivalent –si je puis le souligner modestement- le surhomme capable non pas tellement de redresser les finances publiques mais surtout de vendre les mesures d’austérité nécessaires à la population.

Faut-il encore le prouver ? Mes capacités de communicant sont incontestables et je crois inégalées. Où que je passe et quoique je fasse, mes actions sont plus médiatisées que même la naissance du bébé de Nicolas Sarkozy et de Carla Bruni. Y a-t-il un autre personnage dans l’Histoire dont on a raconté mondialement et pendant des mois dix bêtes minutes de tête à tête avec une femme de chambre guinéenne –un malentendu ?

C’est dire combien vont être populaires mes tête à tête avec votre futur premier ministre, Elio Di Rupo. C’est pourquoi je vous propose d’appuyer ma candidature au poste de ministre président de Flandre. (Ce titre magnifiquement ronflant correspond parfaitement à mon tempérament schizophrène et je suis sûr que ma femme appréciera, ce qui est pour moi l’essentiel).

Le seul hic de l’histoire, comme disait le capitaine Haddock (vous voyez ! Je connais déjà vos classiques !), c’est le néerlandais. On me reconnaît le don des langues mais, de là à la parler aussi bien que M. Di Rupo, pardon, je veux dire que M. Kris Peeters, il y a un pas. Mais plus ça va, plus j’apprends vite. J’ai assimilé l’anglais en quelques années, le guinéen en quelques minutes.

Or, dans une interview que vous venez d’accorder à Humo, je lis que votre femme à journée nigériane parle mieux le néerlandais que votre futur premier ministre.

N’y a-t-il pas là matière à un excellent deal entre nous, cher M. De Wever. Un deal win-win comme vous les aimez ? Pour aller droit au but, comme j’aime, vous me filez votre Nigériane, là tout de suite, et moi, je mets mes compétences et mon carnet d’adresses internationales à la disposition de votre belle région.

Avec ma force de frappe, vous pouvez compter sur moi pour que votre pays explose en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire.

 

www.berenboom.com

DICO 2011

A défaut d’idées, on se bat de nos jours à coups de mots.

La gauche molle contre la gauche forte. Sous Mitterand, les lampions éteints, le pouvoir socialiste avait proclamé venu le temps de la gauche réaliste, ce qui signifiait le super-libéralisme en bretelles rouges ! A quoi ressemblera la gauche espérance que promet François Hollande ? Vu l’état du fond de caisse, on peut soupçonner qu’elle restera un simple jeu de mots.

Et la gauche belge sous Di Rupo, coincée entre libéraux et CD&V, qui clament à haute voix les mots que leur souffle discrètement la N-VA ? Risque-t-on de l’appeler la gauche-droite-malgré-la-tempête ?

Les mots ne veulent décidément plus dire grand-chose. Comparez les mots de bienvenue prononcés par le président Sarkozy à son invité, «le « Guide » Kadhafi, et les mots d’adieu à l’annonce de sa mort.

Ce double langage, cette démocratie à géométrie variable, les « indignés » les dénoncent depuis quelques mois.

Les « indignés », une dénomination qui rappelle les enragés de jadis, contestataires,  révolutionnaires, prêts à renverser l’ordre établi. A l’image des courageux Syriens, Tunisiens, Iraniens descendus dans la rue pour renverser par la parole leurs dictateurs.

Mais nos indignés à nous ? Même Obama et Merkel les trouvent formidables. C’est sans doute le signe qu’au-delà de leurs mots, très justes, on n’entend pas l’écho d’un message alternatif. Un sympathique geste « citoyen » pour utiliser encore un mot devenu aussi exsangue que l’adjectif « bio ».

Remarquez qu’il y a des mots qui disparaissent du paysage médiatique : altermondialistes, par exemple. Que sont-ils devenus ces contestataires qui ont ébranlé la planète il y a dix ans ?  Ministres, banquiers, boutiquiers ?

Preuve que les mots ne signifient plus rien et que les idées ont coulé dans du béton frais, ce titre dans le supplément design du dernier numéro de Victoire. « Devoir de mémoire » au-dessus d’une page présentant la réédition la chaise longue d’une architecte française du siècle passé, Charlotte Perriand.

Emprunter cette expression qui désigne les pires événements du vingtième siècle pour vendre des chaises n’a-t-il pas paru choquant ? La banalisation des mots est le premier pas vers l’effacement de la mémoire et de l’histoire. Et le « devoir de mémoire », il est vrai, bien mis à mal ces derniers temps. Qu’en restera-t-il si on l’utilise pour une pub ? Le plus piquant, c’est que l’architecte en question n’a pas hésité à travailler pour le ministère japonais du commerce et de l’industrie. Et alors, me direz-vous ? C’était pour le Japon impérial et fasciste entre 1940 et 1942…

Je tremble déjà à l’idée du prochain mot branché de cet hiver…

 

www.berenboom.com

 

QUEL BELLA COMBINAZIONE !

Amaï, les amis ! Quelle semaine !

D’abord la nationalisation d’une des deux dernières grandes banques (soi-disant) belges. En un week-end, le très libéral ministre belge des finances et son très modéré premier ministre ont fait ce que le parti communiste français a réclamé vainement pendant plus de cinquante ans…

Coupant l’herbe sous le pied du P.T.B. et de ses chapelletjes.

Quelqu’un a-t-il vu passer le communiqué de félicitations de monsieur d’Orazio au camarade Reynders ?

Et la lettre affolée de l’O.C.D.E. demandant à Mr Leterme si la nationalisation de la Dexia est le modèle des mesures qu’il compte imposer aux états désormais sous sa férule ? Ils ne savaient donc pas à l’O.C.D.E. qu’avec Leterme, c’est tous les jours rock and roll ?

D’accord, chez nous, on ne nationalise que les entreprises en perdition, le temps de trouver le fossoyeur qui va les enterrer. Mr Mittal, une fois ses actuelles petites affaires liquidées, pourrait peut-être s’intéresser à notre Nouveau Crédit Communal-Le Retour ? Le nettoyage des locaux par le vide devrait être dans ses cordes…

Dans la foulée, le successeur de notre éternel premier démissionnaire annonce la sixième réforme de l’état. His-to-rique ?

Disons que cette réforme est à l’image d’Elio Di Rupo devant les micros flamands : laborieuse, un peu schieve, pas souvent compréhensible mais courageuse et de toute façon inévitable.

La « note » du formateur remodelant le pays fait penser à la décision du garagiste qui décide de démonter le moteur en vous disant : comme votre bagnole est fichue, je vous propose un dernier truc. On va mettre les boulons dans un autre ordre et on verra bien si votre tacot veut encore démarrer.

En tout cas les deux événements auront fait au moins un heureux, Jean-Luc Dehaene, débarrassé en même temps de ces scrogneugneu de Français qui l’empêchaient de gérer en chef Dexia et d’une ènième mission royale de la dernière chance pour scinder B.H.V.

A ce sujet, que pense-t-il de l’accord qui vient d’être réalisé (et que lui n’avait pas réussi à nouer) ?

Si on l’interroge, peut-être va-t-il citer cette réflexion très belge de Sigmund Freud (que son papa, qui était psychiatre, a dû lui apprendre): « Faute de pouvoir voir clair, nous voulons à tout le moins voir clairement les obscurités. »

Quant à la bande des huit, elle a aussi des raisons d’être satisfaite des bazars qu’elle a réussi à nouer. Comme le chantait jadis Tohama : « Ah ! Qué bella combinazione ! Yé mé donne, Tou mé redonnes. Mon amour, comment résister ? Jé bouillonne. Eteignons l’électricité ».

Elio au pouvoir, ça nous promet plus de paillettes que Leterme d’Ypres. Et des néons dont notre pays a bien besoin pour retrouver un peu de lustre…

 

www.berenboom.com