La revue Bordel vous attend …

revue bordel

Bordel n°9 : http://revuebordel.com

Auteurs :

Le transibérien des cœurs faibles, Roxane • La chambre noire, Andréa D’Urso • Eden, Eric McComber • Flesh story, Sandra Champagne-ilas • Un garçon, deux filles, zéro possibilité, Fabrice Pierrot • Pink Téléphone, Farah Kay • The Baillard Touch, Laurent Richioud • Comment aborder la fin du monde, Julien Blanc-Gras • Wrath, Lise-Marie Jaillant • Le Bon Belge, Alain Berenboom • Foutraques, Sînziana • Colo, Guillaume Fédou.

Play-list :

Ramuntcho Matta> tu sais tu sais / Bidibop > Merrygoround / MINIZZA > Alter-Ego / Martin Dupont > Your passion / Jérôme Attal > Théorie des nuages / Ultra Milkmaids > My personal tv system / Tape > bm song / Christophe Demarthe > cocoon / Vanilla > Nightwarning / Rainier Lericolais > 4:22 / Quark > Perfect World / Von Magnet > Multiplicity (remix) / Vendetta > La Plage / Jérôme Attal > Pornographie / Serge Comte > rodéo / EHB > Fading.

Toujours :

Bordel au stade, numéro cinq : en librairies, FNAC, Virgin…

21 & 27 avril

actualite
A l’occasion de la parution de son nouveau roman, où il est beaucoup question de James Stewart, Alain Berenboom vous recevra au Flagey studio 5 le 21 avril à 20 heures où il vous présentera « Fenêtre sur cour » d’A. Hitchcock avec James Stewart et Grace Kelly.

Le 27 avril à 19 h30, il vous parlera de son livre au cours d’une rencontre organisée à la Librairie Tropismes et animée par Marc Oschinsky, journaliste.

LA CENE, ETC

chronique
A la veille de Pâques, un chercheur astucieux vient de ressusciter l’évangile selon Judas que l’on croyait perdu. Dans son livre, si le meilleur disciple de Jésus reconnaît qu’il a trahi son maître, il ajoute que trahison n’est pas traîtrise : l’Iscariote aurait agi sur les instructions de Jésus lui-même.
La thèse ne paraît pas absurde. Si Jésus n’était pas mort en martyr mais, comme vous et moi, de vieillesse au fond de son lit, il n’est pas sûr qu’il soit parvenu à sauver l’humanité (Et, à voir l’état de la planète depuis deux mille ans, on n’ose pas imaginer à quoi ressemblerait le monde si Jésus ne nous avait pas sauvés).
Cette histoire devrait inspirer quelques personnages en mal de reconnaissance. Cène, trahisons du disciple, crucifixion, résurrection, quelle belle formule pour relancer une carrière ! Pensons aux politiciens. Faute de rebondissements spectaculaires, trop d’hommes politiques finissent usés, oubliés, discrédités. Qu’ils prennent exemple sur le duo Jésus-Judas.
Nous évoquions récemment les mésaventures de Chirac. Un scénario diabolique, le seul sans doute, pourrait encore barrer la route de l’Elysée à Nicolas Sarkozy : l’adaptation de l’évangile à la France.
La cène : la majorité ressoudée se congratule. La trahison : Villepin dénonce Chirac devant l’opinion publique : c’est lui qui m’a fait la peau, le salaud ! Crucifixion : face à ce coup de Jarnac, Chirac démissionne. Je me sacrifie pour la France ! Nouvelles élections : Chi-Chi revient, à la demande générale. Tes meilleurs amis t’ont laissé tomber, Jaco. Mais pas les Français. Ils sont avec toi ! Exit Sarkozy, Royal et les autres. Et on sonne les cloches…
Au P.S.aussi , l’idée pourrait servir à faire oublier les affaires et autres déceptions d’une trop longue présence au pouvoir,.
La cène : le congrès ; tous les camarades s’embrassent ; on est tous copains, on se serre les coudes. La trahison : à la surprise générale, la fidèle Laurette O. annonce dans une conférence de presse dramatique qu’elle se présente à la présidence du parti pour sauver le PS, la Wallonie, le pays. Crucifixion : Elio jette sa carte du parti et s’inscrit au CD&V. Résurrection : devenu président du CD&V (avec lui, les choses ne traînent jamais), Elio est désigné comme premier ministre. Sonnez les cloches…
Comme on le voit, ce genre de scénario peut se multiplier autant que les petits pains. Il est toujours gagnant. Joyeuses fêtes de Pâques !

Alain Berenboom
Paru dans LE SOIR

P.S. Un livre à signaler pour vos vacances, un roman hollandais, façon grand roman américain: « Malibu » de Léon de Winter (Le Seuil). Une tragédie (la mort d’une jeune fille vue par son père, scénariste raté) sous la plume d’un humoriste (venu de ‘s Hertogenbsoch).

FORZA CHIRAC !

chronique
Triste fin de règne pour Chirac, a-t-on pu lire sous la plume de plusieurs journalistes. Allons donc ! Il y a longtemps que ce grand fou ne nous avait autant amusés. Quel plaisir de retrouver sa façon ludique de secouer la politique, qui nous change du lamento des politiciens chagrins à la mode d’aujourd’hui. Dans le genre ludique, Chirac a toujours fait fort. Rappelez-vous (même si ça remonte à la préhistoire) de la succession de coups de théâtre qui ont égrené son parcours dès le début de son interminable carrière. Coup de poignard à son complice Chaban-Delmas pour faire élire Giscard à la présidence de la république puis carotide tranchée à Giscard pour aider Mitterrand à devenir président. Elimination du triste pépère Jospin qui croyait faire campagne « à gauche » : c’est Chirac qui était apparu comme le champion de la lutte contre la fracture sociale – ramassant au passage 80 % des suffrages, un score que même le général de Gaulle n’avait pu égaler.
Passons sur l’élimination d’Edouard Balladur, son ami de vingt ans, la décapitation de son plus fidèle valet, Alain Juppé, condamné à sa place pour divers petits méfaits à la ville de Paris et à la présidence du RPR. Et le passage à la trappe ou au placard doré de tous ses meilleurs amis politiques, devenus inutiles ou encombrants.
Depuis Alexandre Dumas, personne n’a réussi à écrire en France des aventures aussi palpitantes, surprenantes, rebondissantes. Chirac, c’est les trois mousquetaires à lui tout seul (faute de comparses), le héros et le traître à la fois, Louis XIII, Richelieu et d’Artagnan en un seul homme.
Seule ombre au tableau : la femme du héros. Dans le rôle de Milady, Bernadette ne fait pas le poids. La messe le dimanche, le pèlerinage à Rome. Le personnage n’a pas le panache des autres créations de Chi-Chi. Il y a comme une erreur de casting. Mais, il faut le reconnaître, elle est la seule à avoir survécu à tous les complots.
Le pauvre Villepin, aussi, se croyait indestructible, persuadé d’avoir apprivoisé le grand fauve. Oubliant cette règle essentielle du cirque : une bête sauvage ne peut jamais s’empêcher de mordre même au risque de mettre en péril sa propre vie. Avec son expérience politique, on ne peut croire en effet que Chirac n’a pas vu venir le tsunami qui a emporté son premier sinistre. Dans le climat de peur du changement qui règne en France, d’anti-libéralisme quasi religieux, son projet mal ficelé, non concerté, ne pouvait qu’enflammer le pays. Chirac le savait. Il s’est tu. Trop excité à l’idée de se payer un bon petit coup de jeune après trop d’années d’ennui Raffarin. La carrière de Chirac a commencé dans l’euphorie de mai 68. Il est assez réjouissant qu’il ait choisi de l’achever par un pied de nez dans le bruit et la fureur.

Alain Berenboom

Paru dans LE SOIR

En avril

actualite
A l’occasion de la parution de son nouveau roman, où il est beaucoup question de James Stewart, Alain Berenboom

    • – vous recevra au Musée du Cinéma (Palais des Beaux-Arts de Bruxelles) le 12 avril à 20 h 15 où il présentera « L’Homme qui en savait trop » d’Alfred Hitchcock avec James Stewart et Doris Day;
    • – vous recevra au Flagey studio 5 le 21 avril à 20 heures où il vous présentera « Fenêtre sur cour » d’A. Hitchcock avec James Stewart et Grace Kelly.
  • Il vous parlera aussi, le 27 avril à 19 h30, de son livre au cours d’une rencontre organisée à la Librairie Tropismes et animée par Marc Oschinsky, journaliste.

    UNE PATRIE D’HOMMES BIEN

    chronique
    Pendant qu’une partie des Français manifestent, la planète continue de tourner. Cessez de vous lamenter : Kurt Vonnegut junior vient de livrer un petit livre qui vaut ses meilleurs romans (« Un Homme sans patrie », Denoël). Cela faisait quinze ans que l’écrivain le plus allumé des années soixante et septante nous avait délaissés pour la peinture ou pour la paresse. D’accord, l’auteur du génial « Abattoir 5 » et du « Berceau du Chat » (réédités chez Points-Seuil) a aujourd’hui plus de quatre-vingts ans et il fume toujours (même qu’il promet un sacré procès aux fabricants de tabac qui le menacent de mort par écrit depuis tant d’années !)A côté du portrait qu’il nous livre de l’Amérique, B.H.L. a l’air d’un petit vieux velléitaire.
    Vonnegut n’a pas de mots assez durs pour vilipender l’administration Bush, le mal élu. « J’ai à présent quatre-vingt-deux ans. Merci, bande de rats. La dernière chose que j’aie jamais souhaité, c’est d’être en vie à une époque où les trois hommes les plus puissants de la terre s’appellent Bush, Dick et Colon ». Ou encore : « En écrivant que nos dirigeants sont des chimpanzés ivres de pouvoir, est-ce que je cours le danger de ruiner le moral de nos soldats qui combattent et meurent au Proche-Orient ? Leur moral, comme celui de tant de corps en vie est déjà en miettes. Ils sont traités comme je ne l’ai jamais été : tels les jouets qu’un petit garçon riche a reçus pour Noël. »
    La guerre, Vonnegut la connaît, hélas. Prisonnier de guerre en Allemagne, il est l’un des rares survivants du bombardement de Dresde. Une expérience qu’il a racontée (de façon hilarante) dans son fameux « Abattoir 5 » et sur lequel il revient ici en le dénonçant comme « le plus grand massacre de l’Europe » : 135.000 personnes (des civils) tués par les bombardements britanniques dans la nuit du 13 février 1945.
    La destruction de la planète, la folie du pétrole et quelques autres démences de notre époque sont disséquées avec le même vitriol mais Vonnegut s’attarde aussi sur la définition du crétin, l’importance de l’humour et dresse le portrait tendre de quelques amis, notamment du magnifique dessinateur d’humour Saul Steinberg.
    A l’heure du discours consensuel, quand chaque mot est pesé et emballé, les aspérités gommées, les conflits niés, il est revigorant d’entendre une voix qui crie vrai, fort et drôle et qui prend le risque de choquer (toujours avec art).
    Un pays où vivent en même temps Bush junior et Vonnegut junior ne peut être tout à fait mauvais.

    Alain Berenboom

    Paru dans LE SOIR

    P.S. : Encore un livre à signaler pour vos vacances, un roman hollandais (façon grand roman américain) : « Malibu » de Léon de Winter (Le Seuil). Une tragédie (la mort d’une jeune fille vue par son père, scénariste raté) sous la plume d’un humoriste (venu de ‘s Hertogenbsoch, comme quoi…).

    LA COURSE AU HOOLIGAN SAUVAGE

    chronique
    Haro sur le fringant capitaine du Standard ! Sergio Conceicao a craché sur l’adversaire, bousculé l’arbitre avant de sortir du terrain, torse nu. D’accord, c’est scandaleux. Mais, s’il y avait eu méprise ? Si le soulier d’or avait cru que, pour se faire entendre en Belgique, il fallait désormais éructer ? Hommes et femmes politiques, industriels, même juges et journalistes, tout le monde semble en effet gagné ces temps-ci par le syndrome du hooligan sauvage. Chez ces gens-là, les crocs-en-jambe sont sans doute moins spectaculaires, les crachats plus feutrés, la bousculade moins physique. Mais pas moins traîtres.
    Voyez par exemple comment Olivier Maingain a brandi la carte rouge contre son rival, Didier Gosuin (cumulant les rôles d’arbitre et de joueur). On regrette d’ailleurs que le challenger ait disparu aussi discrètement alors qu’il avait si bien commencé à cracher son venin. Et quel dommage que le pimpant bourgmestre d’Auderghem n’ait pas quitté la tribune, torse nu, en jetant au passage veste, chemise et cravate à la figure de son ex et futur président.
    Que dire aussi des critiques de certains journalistes à propos du prince Philippe en voyage économique en Afrique du sud ? Une mission brillante et réussie, d’après la plupart des participants, y compris le très peu royaliste ministre Van Quickenborne. Mais pour alimenter leurs objectifs très peu journalistiques et très bassement politiques, quelques messieurs n’ont rien trouvé de mieux que de faire une affaire d’état de la plainte d’un quidam, vexé que le prince ait osé ne pas le reconnaître alors qu’il l’avait déjà croisé, paraît-il, dans l’un ou l’autre pince-fesses. La manœuvre de ces messieurs s’appelle un tacle sournois. Sur le terrain, il vaut une carte rouge (à Anvers, une carte noire…)
    Et la saga du survol de Bruxelles ? Un tribunal oblige le gouvernement à disperser les vols, un autre à les concentrer. Ces deux juges ont fait mieux que se cracher à la figure. Ils se sont carrément marché sur la tronche ! Comme ces politiciens plus soucieux de la chasse aux voix de préférence qu’à la sécurité des passagers et des habitants. Tiens, une idée : puisque la route Onkelinckx s’est enlisée dans un champ de patates, ne pourrait-on suggérer que les avions descendent désormais sur Bruxelles-national en survolant les terrains de football de la capitale plutôt que les maisons ? Au passage, le bruit étouffera peut-être les injures, les cris et autres délikatessen que s’échangent joueurs et supporters

    Alain Berenboom

    Paru dans LE SOIR

    PS : Un roman hollandais (façon grand roman américain) à recommander absolument : « Malibu » de Léon de Winter (Le Seuil). Une tragédie (la mort d’une jeune fille vu par son père, scénariste raté) sous la plume d’un humoriste.

    LE PETIT CHEMIN QUI SENT LA NOISETTE

    chronique
    Lu dans la Petite Gazette du 15 mars dernier : « Au cours d’une balade à vélo, une habitante de Thibodaux, en Louisiane, a découvert par hasard sur un tas d’ordures une édition d’époque en 17 volumes des « Misérables » contenant ce qui semble bien être un mot d’amour et une note personnelle, écrits de la main même de Victor Hugo. »
    Cette dépêche de l’agence A.P. me hante. Depuis, ma vision du monde a basculé. Ainsi que mes certitudes. J’ai toujours pensé qu’il y a une explication à tout. Et que les gazettes me la fourniront presto. Or, l’affaire de la vélocipédiste de Thibodaux remet les pendules à l’heure : rien que des questions sans réponse.
    D’abord, celle-ci : comment une dame circulant à vélo le long de la décharge publique a-t-elle réussi au passage à apercevoir dans le tas d’ordures entre un frigo abandonné, deux vieux matelas, des tas de canettes, les débris d’un moteur et des matières molles non identifiées, dix-sept volumes de Victor Hugo ?
    Autre mystère : La ville de Thibodaux est renommée pour le magnifique bayou qui l’arrose, le bayou Lafourche, que les touristes viennent admirer de partout. Les promeneurs peuvent aussi parcourir les kilomètres de sentiers du parc Peltier. Pourquoi donc une énigmatique vélocipédiste a-t-elle préféré hanter le dépôt d’immondices plutôt que de flâner le long des petits chemins qui sentent bon la noisette?
    Et cette touche finale : le livre contient « ce qui semble être » un mot de la main de Victor Hugo. Qu’est-ce que ça veut dire ? Le « mot » est-il d’Hugo ou pas ? Qui va trancher ? Et surtout, quel est ce mot ?
    Cette interrogation encore : pourquoi une habitante de Thibodaux a-t-elle songé à charger sur son porte-bagages dix-sept volumes d’un ouvrage rédigé dans une langue qu’elle ne comprend pas (même le site officiel de la ville est uniquement en anglais) ?
    Qui parle encore français dans les bayous de la Louisiane, sinon les centenaires ? Y a-t-il des mamies centenaires cyclistes à Thibodaux ?
    Cette affaire simple est décidément beaucoup plus embrouillée qu’il ne paraît à la première lecture. Or, personne ne l’a décodée. Que faut-il alors penser des niouzes apparemment plus complexes que la presse nous déverse heure après heure ? Agissements des mouvements palestiniens ou de l’armée israélienne, chaos irakien, rodomontades de Chavez au Vénézuela, influence supposée des religieux sur la politique américaine, position de la fédération socialiste de Charleroi sur les paris chinois, dessous des prix littéraires et ceux des belles dames, j’en passe et de plus byzantines. Trente ans après, Dutronc aurait-il toujours raison ? On nous cache tout, on ne nous dit rien.

    Alain Berenboom

    Paru dans LE SOIR

    MALAISE DANS L’AFFAIRE ERDAL

    chronique
    D’où vient ce sentiment de malaise dans l’affaire Erdal ?
    Du cafouillage des agents de la sûreté ? Depuis l’apparition des bouffons (qui coïncide avec l’arrivée de la civilisation), on sait que rien n’est plus réjouissant que d’assister aux ébats de pandores maladroits. On n’est donc pas vraiment surpris que trente deux agents aient perdu les traces d’une petite dame qui s’est enfuie en autobus. Qui a jamais cru que les Dupondt de la Sûreté belge avaient été formés par le Mossad ? Je dirais même plus : qui a jamais cru que le Mossad belge avait été formé par les Dupondt?
    Non, le malaise vient de ce que madame Erdal, soupçonnée de délits graves mais aussi candidate réfugiée politique, attendait tranquillement son jugement (et l’examen de la demande d’extradition vers la Turquie) dans une petite maison confortable, feu ouvert dans le salon et armes d’assaut dans la cave, juste à côté de la réserve de vin.
    Le groupe dont madame Erdal fait partie a du sang sur les mains (quoique madame Erdal, suspectée d’avoir prêté la main à un triple assassinat, n’a pas encore été condamnée de ce chef). Rien n’excuse les méthodes de ce groupe, sa violence, sa prétention de décider de la vie et de la mort de ses victimes. Et certainement pas la violence d’état qui, hélas, continue de tacher la plus grande république laïque d’Orient, la négation du génocide arménien, la ségrégation de ses minorités, les méthodes musclées des groupes d’extrême droite qu’elle tolère ou les procès politiques contre ses intellectuels (poursuites contre l’écrivain O. Pamuk ou condamnation du vieux sage de la littérature turque, Yachar Kemal, l’auteur de la magnifique saga de Mèmed le Mince).
    On pourrait se réjouir, avec la ministre de la justice, que madame Erdal ne soit pas restée en prison en attendant son jugement, qu’elle a bénéficié de la présomption d’innocence. On veut bien croire que les agents de la sûreté étaient aussi là pour la protéger des milices turques. Il est bon de se rappeler soudain le statut spécial des prisonniers politiques instauré chez nous dès le XIXème siècle et dont nous devrions être fiers. Ce qui gêne c’est que ces beaux principes, on a l’impression ces dernières années que tout le monde les avait oubliés. Pourquoi en effet deux poids, deux mesures ? Pourquoi tant de braves gens, qui n’affiche à leur casier judiciaire même pas une contravention pour stationnement interdit à Kaboul, à Rabat ou à Lubumbashi sont-ils enfermés comme des chiens dans des centres fermés, honte de notre système administratif ? Pourquoi eux et leur famille sont-ils traités comme des chiens par la police des étrangers ? Pourquoi des enfants sont-ils détenus comme des chiens au mépris de nos lois si respectables ? Alors, oui, on ressent un certain malaise…

    Alain Berenboom

    Paru dans LE SOIR