LA CRISE EST FINIE

Mc Cain : Assieds-toi, fils. J’ai tout arrangé. Je suis d’accord avec toi : l’Amérique ressemble ces jours-ci à une bagnole sur le point de rendre l’âme. Mais, grâce à mon plan, quand tu deviendras président (il lui fait un clin d’œil), tu auras l’impression de recevoir de G.W. Bush les clés d’une voiture neuve. Il suffit que tu apposes ta signature là, en bas, tu vois ? Juste en dessous-de la croix. Tu veux mon stylo ? Tu peux le garder. En souvenir.
Obama : John, pourquoi cette réunion doit-elle se tenir à Anchorage ? J’ai froid et ça pue le pétrole dans cette maison !
Mc Cain (à mi-voix) : chut ! cela fait tant plaisir à Sarah. Ne le répète pas mais elle se sent un peu inutile.
Sarah Palin (entrant avec un plateau de thé) : Surprise ! Je l’ai fait chauffer moi-même sur un feu de bois. (A Obama 🙂 On se connaît ? Non, ne dites rien. Je sais que John essaye de me tester. Voyons, vous êtes président de l’Afrique, hein ?
Mc Cain (poussant un soupir): Sarah, tu ne reconnais pas notre ami Barack Obama ?
Palin : My God ! Où avais-je la tête ? C’est la faute de ces sacrées lunettes. Je l’avais dit à l’opticien. Mais il m’a répondu qu’elles m’allaient si bien et que, de toute façon, il n’y a rien à voir.
Mc Cain (il lui tend un journal) : Sarah, sois une bonne fille. Tu m’as promis de connaître toutes les subtilités de la politique internationale d’ici la fin du mois.
Obama : Bon. Laissez-moi étudier votre projet, John. D’ici l’Election Day, je risque d’être un peu à la bourre. Mais dès le 5 novembre, je vous promets d’y consacrer un peu de temps.
Mc Cain : Comment ? Attendre alors que les Etats-Unis sont en danger ? Laisser d’autres compagnies se casser la figure ? D’autres hommes perdre leur emploi ? 600.000 travailleurs ont déjà perdu leur job depuis janvier ! Seriez-vous un mauvais Américain?
Palin : Au secours ! Un terroriste dans ma maison !
Obama : Sarah, voulez-vous déposer ce fusil ? Est-ce que j’ai une tête d’ours blanc ?
Mc Cain (s’impatientant): Alors, Barack, tu le signes ce plan ? Les patrons s’impatientent ! Ils attendent leurs chèques. Et moi, les contributions pour ma campagne…
Obama : Ecoute, John, discutons de tout ça lors de notre prochain face-à-face télévisé.
Mc Cain : Face-à-face ? Fils, épargnons à nos compatriotes le spectacle d’une Amérique qui se divise alors que le monde entier se ligue contre nous. Voilà ce que je te propose : changeons les règles. Je deviens président et toi, vice-président. Du coup, les Américains iront travailler le 4 novembre plutôt que perdre leur temps à aller voter.
Palin (brandissant le journal): Cessez de vous chamailler, les gars ! La crise est finie ! Le monde est sauvé !
Mc Cain et Obama : ??
Palin : Le C.D.&V. a largué la N-VA !

Alain Berenboom
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L’HOMME DE LA RUE

Le krach boum hue qui secoue l’économie américaine, ébranle les bourses de la planète et menace le prêt à tempérament de la nouvelle machine à laver du couple Leterme-De Wever donne lieu à un matraquage de commentaires assourdissants dans les media. Depuis l’éclatement de la bulle financière, tous les spécialistes et autres gourou défilent devant micros et caméras pour expliquer d’un air constipé la raison d’une catastrophe qu’ils n’ont ni prévue ni annoncée ni comprise mais, à leur air posé et grave, on devine que, si on les avait entendus, on n’en serait pas là. Exemple, les discours lénifiants du nouveau patron du F.M.I., Dominique Strauss-Kahn qui claironnait il y a quelques semaines que le pire était passé. La situation allait bientôt se redresser. Ah ! Entre parenthèses, aucune de ces madames Soleil n’évoque les salaires déments des dirigeants des entreprises qui précipitent aujourd’hui le monde dans la crise ni leur maintien aux commandes alors que c’est leur mode de gouvernance qui a ouvert le gouffre. Comme on le dit à la Fédération française de football, on ne change pas une équipe qui perd.
Cette semaine, on épinglera le commentaire du vicomte Davignon, venu expliquer avec son talent habituel d’emballeur pourquoi la vente vite faite à Lufthansa de la compagnie Brussels airlines, créée pour sauver l’aéronautique belge et la présence de notre pays dans le ciel après la faillite de la Sabena, était une magnifique opportunité pour préserver l’image belge de la compagnie ! Et de rassurer « l’homme-de-la-rue » sur l’avenir du monde en général, de la Belgique en particulier et du sien de toute façon. Et, dans la foulée, d’apaiser l’homme-de-la-rue : son portefeuille d’actions n’est pas en danger. Pour le vicomte, l’homme-de-la-rue a nécessairement un portefeuille d’actions…
L’Homme-de-la-rue, quelle expression délicieusement désuète ! Un film de Frank Capra l’avait rendue célèbre (en version originale, Meet John Doe ). Gary Cooper incarnait un pauvre qui annonçait son suicide le soir de Noël à cause de la situation sociale et économique (le film se passait pendant l’autre crise, celle des années trente). Mais le film était aussi et surtout une dénonciation de la manipulation du citoyen par la presse et le pouvoir. John Doe n’existait pas. Son désespoir était bidon. C’était un faux pauvre, mis en scène par une journaliste qui avait trouvé là matière à un beau scoop.
Alors que gronde à nouveau la crise, on a un peu l’impression de se retrouver dans la situation de John Doe, victime de la situation économique mais aussi totalement déboussolé par les explications qui en sont données. Espérant qu’un Capra déchirera le rideau de fumée…

Alain Berenboom
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PAR LE TROU DE LA SERRURE

Choquante, l’interview de rentrée de M. Reynders dans notre quotidien favori. Selon le président du M.R., vice-premier, ministre des finances, si la Wallonie stagne, c’est la faute aux Wallons. Il est temps de retrouver « le goût de l’effort » qui nous fait tant défaut, martèle Grosse tête-triple casquette.
On comprend l’amertume de Rudy Demotte. Après tant d’efforts pour décrocher la tête de la région wallonne puis de la communauté française et tant de soirées à apprendre le néerlandais, lui reprocher de ne pas avoir « le goût de l’apprentissage pour les matières de base », c’est un peu fort de café, sterk van koffie. Et ce faux calme de se lâcher : « Mr Reynders est le cheval de Troie des Flamands » ! On croit entendre la voix de Zeus lui-même.
Pourtant, Reynders a raison de dénoncer le talon d’Achille de la Wallonie, le chômage. Mais comment trouver du boulot ? Il y a ceux qui comme Ulysse font un long voyage, abandonnant leur pauvre région à son sort. Mais beaucoup d’autres s’accrochent, cherchent, envoient leur CV sans désespérer malgré les réponses de refus polies, moins polies ou pas de réponse du tout. Faut dire que les politiques trustent à eux tout seuls les principaux jobs wallons : Reynders occupe trois fonctions de chef à lui tout seul, Milquet et Demotte, deux, di Rupo aussi. Sans parler des mandats dans les intercommunales. Or, voilà que les autres jobs, qu’on obtenait jusqu’ici grâce à la concierge de la copine de la petite amie du ministre, deviennent eux aussi inaccessibles. Un échevin schaerbeekois recherche un chef de cabinet par le biais des petites annonces ! De plus, il exige des candidats bilingues. D’accord, le poste convient à Reynders et Demotte, mais que reste-t-il alors aux autres ? Même profil pour le Mouvement réformateur qui cherche des universitaires bilingues, de préférence quadrilingues, intéressés par l’actualité politique et économique. Qui peut prétendre à ce poste sinon Reynders et Demotte ! Who else ?
Les autres offres d’emploi dans « Références » sont aussi décourageantes. Il faut déjà faire un petit effort pour traduire « store manager » simplement en « patron du magasin. » Mais, allez comprendre ce « people-oriented » recherché par une société de Hesbaye ? Et le « plant manager » demandé par une firme de Manage. Un jardinier ? Non, un directeur de site industriel alimentaire, semble-t-il. Ne laissez pas tomber les bras ! Au milieu de ce charabia, j’ai trouvé une annonce si fraîche que j’ai vérifié la date du journal. Un serrurier engage un apprenti « habile, honnête, distingué, ponctuel et courageux ». Ah ! En voilà enfin qui ouvre la porte à la Wallonie de demain.

Alain Berenboom
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Mes Mais 68

Mai 68, parlons-en. J’ai le souvenir d’un rêve, d’une folle sarabande.
Je ne parle pas des barricades ni des pavés. Ni des meetings enflammés ni des nuits de fête et de la baise à gogo. Tout ça, c’était pas pour moi. J’en avais rien à cirer, moi, de ces étudiants, de ces fils et de ces filles à papa, qui s’habillaient en prolos pour aller casser la gueule des flics (tiens, de vrais prolos, ceux-là !) au nom du peuple ou de je ne sais plus très bien quoi.
Rien à faire non plus de tous ces travailleurs qui avaient trouvé l’occasion de faire repos général, machines en panne pour revendiquer l’impossible. Juste pour le plaisir de faire chier. Sans savoir qu’ils vivaient le bref instant d’une époque sans chômage.
Mai 68, pour moi, c’est le boulot. Le moment où j’ai travaillé avec le plus de liberté, de plaisir et d’efficacité. Pendant que tous les autres jouaient à on arrête tout et on ne recommence plus, moi je suais comme un malade, parcourant des centaines de kilomètres, portant des colis sur mon dos pire qu’un baudet. La semaine de quatre-vingts heures au moins. Je me suis même demandé si je n’étais pas le seul, le dernier travailleur de France. Dites donc, si j’en avais parlé à un journaliste, peut-être que de Gaulle il m’aurait donné la médaille ? Et ils m’auraient exhibé à la télé comme un modèle face à tous ces paresseux, tous ces glandeurs.
Evidemment, j’aurais été mal si Mon général, il m’avait demandé, en m’épinglant la médaille sur ma poitrine, dites donc, mon ami, quel est votre secret ? Quel est ce boulot que vous aimez tant ? Difficile de répondre : moi, mon général ? Eh bien, je joue du surin pendant que les autres se dorent au soleil du printemps.
Au fond, je me fais peut-être des idées. Général, c’est un peu le même métier que moi mais en plus grand.
Oui, pour nous tueurs, mai 68, ç’a été le temps béni. Sans un flic à l’horizon. Tous occupés à taper sur ceux qui ne travaillaient pas. Pas de risque. Pas de danger. Personne pour vous dénoncer. Plus d’essence pour vous poursuivre. Pas de voisins. Z’étaient en ballade à la recherche de l’aventure, alors que l’aventure se passait sur leur palier pendant qu’ils étaient absents. Ah ! Les cons !
Qu’est-ce que j’ai pu en tuer en mai 68… Mon meilleur tableau de chasse. Trois veuves, un colonel, deux banquiers, un buraliste, un marchand de vin. Et une podologue. Avec celle-là, tiens, j’ai eu des scrupules. Peut-on étrangler une podologue sans savoir ce qu’elle fait dans la vie ? Remarquez, je le lui ai demandé. Podologue, c’est quoi ? Un peu trop tard peut-être. Je serrais trop fort, je crois. Je contrôlais mal ma force à l’époque.
En sortant de la dame, j’ai vu à la télé une grande manifestation. Pour le retour du général de Gaulle. Contre la chienlit. Moi, je l’aimais bien mongénéral. Alors, j’y suis allé et j’ai chanté comme les autres la Marseillaise. A côté de moi, se trouvait un ministre. Blanc comme un rat, l’air perdu et malheureux. Depuis trois semaines, je me terre dans ma cave, il m’a avoué. C’est la première fois que je pointe le nez dehors. Il n’y a pas de danger, pensez-vous ? Je l’ai rassuré comme j’ai pu. Si quelqu’un s’attaque à vous, faites-moi confiance, il trouvera à qui parler ! Riez pas, j’étais drôlement musclé. Et le type me faisait vraiment de la peine. La manif a été un succès. On braillait à tue-tête, on se donnait le bras. On réoccupait le pavé. Et on a fini la journée dans un bistrot. C’est lui qui a insisté, remarquez. Moi, ça me gênait un peu. Vu que les petites affaires de la podologue étaient dans la poche de mon imperméable et que j’avais pas envie qu’elles glissent sur la table. Bref, de fil en aiguille, on est devenu les meilleurs potes du monde. Comme je lui ai raconté que j’étais sans boulot (j’allais pas lui avouer…), il m’a fait entrer dans son cabinet comme chauffeur et aux élections, je suis devenu son suppléant. T’es le seul à qui je peux faire confiance, il a insisté car j’étais un peu réticent à entrer dans ce monde-là. Ce qui m’a décidé c’est quand il a ajouté : t’es le seul qui veut pas me faire la peau. Mes amis politiques, ils sont tous prêts à me planter un couteau dans le dos.
J’ai attendu deux ans avant de le suicider. Et de le remplacer. Il m’a fallu encore un peu de temps pour devenir ministre. Maintenant, je peux voler et tuer tranquille. Et pourtant, vous savez quoi ? Je donnerais tous les ors de la république pour retrouver la liberté de mes journées de mai 68. Bon, je vous laisse, j’ai un discours, là. L’inauguration d’une prison, je crois.

Alain Berenboom

LA RENTREE 2008

Rencontres à la rentrée avec Alain BERENBOOM à propos de son roman « PERILS EN CE ROYAUME »:

    _ lundi 8 septembre à 20 h. à la la Bibliothèque de Rhode Saint Genèse
    _ jeudi 18 septembre à 17 h. à la Librairie Pax à Liège
    _ jeudi 18 septembre à 20 h. au Foyer culturel juif de Liège
    _ jeudi 25 septembre de 10 h. à 16 h. Journée polar à l’Académie de Police de Jurbise: auteurs de polars v. flics…
    _ jeudi 25 septembre à 20 h. Soirée à la Galerie Rousseleau à Bruxelles en compagnie de Alain Fralon et de l’abbé Vanderbiest
    _ week end Polar organisé par la Bibliothèque de Saillans les 11 et 12 octobre
    _ mercredi 5 novembre: entretien au FRAM à Liège avec J. Paque
    _ jeudi 13 novembre à la Maison de la Culture de Tournai

GARDE A FOUS !

chronique
Les querelles autour de BHV et autres gamineries ont quelque peu laissé dans l’ombre les grandes manœuvres militaires de notre nouveau taieut ! taieut ! ministre de la défense, Piet De Crem. On dirait que revêtir l’uniforme de patron des forces armées transforme les plus braves types en ganaches ridicules et dangereuses. On se rappelle en France de Jean-Pierre Chevènement, l’incarnation de la gôche de la gauche, devenu par la magie d’un maroquin sgrogneugneu vous me ferez huit jours. Oublions le spectacle pathétique de ces gros ministres de la défense qui se glissent dans le cockpit de nos redoutables avions de chasse, déguisés en Buck Danny, le temps d’une photo.
A peine dans la place forte, Piet De Crem s’y met à son tour. Dès son entrée en fonction, il a interdit à l’armée d’assurer les visites scolaires des camps de concentration : le spectacle des victimes était trop déprimant pour nos militaires. Il préfère les annonces martiales, le rassemblement dans la cour et que ça saute ! Tout ça pour se donner l’allure d’un vrai soldat en envoyant au casse-pipe quelques appareils, dont on disait pourtant que la Défense nationale n’avait même plus les budgets pour assurer leur approvisionnement.
Espérons qu’un petit malin n’ait pas eu l’idée entre temps de les équiper en réservoirs à bio-carburants, vu qu’en Afghanistan, on ne cultive plus que du pavot. Au prix de l’opium sur les marchés, faire voler nos avions serait impayable. On aurait portant aimé voir nos pilotes, bercés par la vapeur, chantant à tue-tête « ça plane pour moi ! »
L’Afghanistan vaut bien une guerre ? On comprend qu’il faille empêcher les Talibans et autres fous de Dieu de remettre la main sur ce pays martyrisé. Mais les meilleures intentions du monde tournent en eau de boudin lorsque les missions des Occidentaux lâchés sur le terrain sont floues.
L’invasion de l’Afghanistan a été autorisée par les plus hautes instances internationales et les troupes américaines ont réussi, avec leurs alliés, à chasser du pouvoir les scélérats qui avaient fait de ce pays une prison folle. Bravo. Mais, comme en Irak, le remède s’est révélé aussi mauvais que le mal, faute de projet, de préparation, de rééducation de la population, de prise en charge et d’éducation de la société civile (ce que les Alliés avaient fait après la seconde guerre mondiale en Allemagne ou au Japon.)
Envoyer quelques F-16 et des soldats courageux ne suffit pas, sans un projet précis, avec des instructions claires, un travail avec la population locale. Tout ce qui semble ici faire défaut et qui n’a jamais fait l’objet d’un débat politique. Comment dit-on en langage militaire : danger casse-cou ?

Alain Berenboom
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QUI DONC EST FLAMAND ?

chronique
A écouter les émissions de jazz contemporains, on a l’impression que les frontières du jazz ont explosé. Ce qui pose la question : qu’est-ce que le jazz ? Que faut-il pour qu’un musicien entre dans ce club très select ? Pour certains, le mot vient de l’argot « gism/jasm » qui signifie force, exaltation ou sperme. En est-il de même pour les Flamands ?
Je veux dire : quelles qualités faut-il réunir pour être flamand ? Ecartons le sperme. On n’est pas flamand par l’origine familiale; nous ne vivons pas, quoique disent certains, dans le chaudron déjanté des Balkans. Personne ne met en doute la « flamanditude » de M. Leterme ni la « wallonitude » de Laurette Onkelinck. Parler la langue ne suffit pas. Parfaits bilingues, Louis Michel et Didier Reynders ne sont pas (encore) dans la course pour la présidence du NvA ni même celle de la Flandre. Herman de Croo et Mark Eyskens, qui parlent le français le plus châtié de tous les hommes politiques belges, sont flamands, n’en déplaise à leurs détracteurs. S’il fallait classer nos excellences selon la façon dont ils s’expriment, la plupart pourrait d’ailleurs fermer boutique…
Le nom n’est pas non plus une indication : les radicaux flamands comptent sur M. Bourgeois et les Wallingants sur Van Cauwenberghe.
Reste la langue du diplôme mais rien n’empêche d’étudier dans une autre langue que celle dans laquelle on a été élevé. Et le passage d’un enseignement à l’autre devient heureusement de plus en plus à la mode.
Le droit du sol n’est pas non plus une indication à entendre les cris d’orfraie poussés par certains politiciens flamands contre la présence de « francophones » sur leur sacré territoire. Suffit-il de ne pas contester la circulaire Peeters pour être flamand ou d’exiger à tout prix de lire sa note de gaz en français plutôt qu’en chiffres arabes pour perdre cette qualité ?
Quant à notre jeunesse, elle est de plus en plus bigarrée. Un ancêtre venu d’ailleurs sera-t-il demain le seul indice pour être un vrai belge ? Même pas. Ces jeunes se retrouvent aussi obligés de se déclarer flamands ou francophones, malgré eux.
La conclusion qui s’impose est donc que nous sommes tous juifs allemands. Ce qui, soi-dit en passant, résout un certain nombre de problèmes en suspens.

Alain Berenboom
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PS : Ce billet est dédié à la mémoire de Kamiel Van Hole. Ecrivain et poète flamand, il fut un amoureux de la liberté, adversaire farouche de l’intolérance. Notamment à travers diverses aventures littéraires qui réunissaient écrivains flamands et francophones, comme « Bloum à Bruxelles » (édition Le Castor astral) et « Drôle de Plumes » (édition Moulinsart). Ou les récitals du 01.10. 2006 contre l’extrême droite.

TOMMEKE, TOMMEKE, WHAT DOET JE NU ?

chronique
Il y a quelques années, lorsque des enquêteurs avaient trouvé des produits dopants au domicile de Frank Vandenbroucke, le champion cycliste avait déclaré qu’il les avait achetés pour son chien.
Tom Boonen n’a pas de chien. Ni chat, ni poisson rouge, ni dinosaure, ni personne pour encaisser à sa place le rail de cocaïne dans lequel il s’est planté. Notre superbe champion du monde, maillot vert au Tour, vainqueur du dernier Paris-Roubaix, est à la dérive. Exclu du Tour de France. Chassé du tour de Suisse. Incertain pour le championnat du monde. Sous le coup de poursuites pénales. Tommeke s’est excusé d’une voix blanche (évidemment) tandis que son directeur sportif vantait le mérite des coureurs qui le remplaceront lors du prochain Tour…
Les observateurs s’interrogent sur cet incroyable dérapage. En principe, les champions ne se plantent que dans la descente, jamais dans l’ascension. Boonen, il est vrai, est un piètre grimpeur. Comment expliquer cette incroyable gaffe ? Dans un sport en pleine implosion, les vedettes tombent comme des mouches. Celles qui survivent sont aux abois. Traquées, guettées, sous le coup de rumeurs permanentes.
Toujours sur la défensive, malgré son talent, son image d’homme propre, équilibré, de rouleur superbe, Tom est un artiste rappelant les grandes figures de jadis, Impanis, Rik Van Looy, Eddy Merckx, Roger de Vlaeminck. Equilibré ? Non, sans doute. Pardon, Justine, mais se domicilier à Monaco, cela démontre déjà un cynisme indigne d’un champion. Et la coke, d’autres fêlures. Un homme qui a prouvé qu’il est au-dessus des autres par son art ne peut prétendre qu’il est au-dessus des lois. Au contraire.
Mais quelle sanction lui appliquer ? Le mettre hors course, c’est tuer ce qui reste du cyclisme. La prison ? Pour qu’il sombre définitivement ?
Reste les peines de substitution. Deux cent cinquante heures de travaux d’intérêt général. Genre promener le chien de Vandenbroucke et lui parler pour le désintoxiquer. Lire la Bible à Yves Leterme sur son lit d’hôpital. Dans ce domaine, le juge a un grand pouvoir d’appréciation. On pourrait exiger de Boonen une solution à la scission de l’arrondissement électoral de Bruxelles Hal Vilvorde avant le 15 juillet s’il veut représenter la Belgique au prochain championnat du monde. L’organisation du mariage de Bart de Wever et d’Olivier Maingain avec Arno à l’accordéon. L’envoyer auprès du président Kabila plaider la cause de la Belgique en échange de l’organisation d’un tour du Congo auquel il devra participer (il n’a pas hésité à jouer le clown dans un improbable tour du Quatar). Bref, les projets ne manquent pas pour remettre en selle notre champion. Allez, Tommeke !

Alain Berenboom
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LE NOIR ET LE JAUNE

chronique
Je vous annonce une bonne et une mauvaise nouvelle.
La bonne : la Belgique a une politique étrangère.
Voici la mauvaise.
L’histoire commence à Léopoldville. Croyant servir le roi Léopold II (ce que personne n’a osé démentir pour ne pas le fâcher car ses colères sont terribles), monsieur Charles De Gucht, est descendu de son beau vaisseau. Et là, surprise : la grande et majestueuse statue de Stanley qui dominait le fleuve a disparu. Enlevée, l’œuvre monumentale que la Belgique avait offert à sa colonie comme un vulgaire portrait de Saddam Hussein. En cours de nettoyage, lui a-t-on dit pour ne pas l’irriter. Ah ya ? Awel ! C’est bon pour une fois ! Tournant son regard de l’autre côté de la route, il a aperçu que des Chinois étaient en train d’y travailler. Des Chinois aussi agrandissant le port. Des Chinois partout ! Là, il est vraiment devenu rouge. Les dents serrés, il a expliqué aux chefs des Noirs que les Jaunes, c’est pas bon pour eux. A rappelé le souvenir de l’horrible Fu Manchu. Les rapports d’Amnesty International sur les violation des droits de l’homme au pays de Mao. L’histoire de l’esclavage (non, ça c’est les Arabes. Ah oui, excusez-moi, je mélange un peu les pinceaux). Il a aussi vanté l’excellence des entreprises belges qui sont prêtes à offrir des beaux 4 x 4 à qui veut parce que, comme l’a si aimablement rappelé notre ministre, chez vous, tout le monde est corrompu. Et, comme après un long silence, personne dans l’assistance n’a levé le doigt pour demander une 4×4, il s’est vraiment mis en rogne et il a conclu, l’index levé, que comme le disait si bien une de leurs compatriotes à son enfant (immortalisés par Hergé) « Si toi pas sage toi y en seras jamais comme Tintin ».
Tout content d’avoir fait son devoir moral et flatté ses électeurs de Berlare, notre Excellence est parti pour Pékin.
En débarquant de son beau vaisseau, il a immédiatement remarqué que la gigantesque sculpture que les contribuables belges ont offert à l’empire du Milieu l’attendait, toute belle et toute blinquante, le vice-maire de Pékin planté à côté, un beau sourire sur les lèvres (le maire, lui, était en train d’essayer sa nouvelle 4 x 4. Mais c’est une autre histoire).
Fu Manchu ? Les droits de l’homme ? De quoi parlez-vous ? Tout ce bazar, c’est bon pour les discours en Afrique. A Pékin, on ne se rappelle que les rapports d’Amnesty International dénonçant les horreurs de la guerre dans l’est du Congo. Et on montre du doigt tous ces chefs noirs qui s’en mettent plein les poches.
Heureusement que la Belgique a une politique étrangère.

Alain Berenboom
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