PIERRE, PAPIER, CISEAU

   L’un des principaux groupes éditoriaux français vient de subir une cyber-attaque de pirates informatiques qui réclament rançon pour mettre fin à l’invasion de ses guerriers viraux. Entre temps, tout est bloqué, manuscrits, mails, comptabilité, accès aux archives ou aux contrats que l’on croyait à l’abri dans le cloud. Le nettoyage risque de prendre des semaines. 

 Les pirates des grands chemins devenus malandrins des autoroutes de l’information ont déjà rançonné des milliers d’entreprises et même des hôpitaux. 

   Or, les gouvernements ne cessent d’accélérer le passage à l’informatique. Pour obtenir un document administratif, remplir une déclaration, avoir accès à des archives, des services, on passe au tout virtuel, modèle que la pandémie a accéléré. Même pour la vaccination il faut s’inscrire en ligne. Et l’on ne se parle plus que via les réseaux sociaux. Bientôt, pour voyager, le ticket ou le certificat de vaccination ne seront plus qu’un QR code. Modernité, rapidité, facilité. On ajoute aujourd’hui l’hygiène pour justifier la virtualisation. 

Mais que faire des réticents à l’informatique, les RAI ? Des citoyens de seconde zone, privés d’accès aux services publics ? Et interdit d’accès à certains produits ? Les RAI déraillent s’ils n’ont pas pris le train en marche. 

Or, voilà que les hackers aigrefins viennent nous rappeler la fragilité de l’empire du 2.0. 

Le secrétaire général de l’ONU, M. Guterres a mis en garde dans son discours à l’occasion du 75 ème anniversaire de l’institution contre « la face obscure du monde numérique », en soulignant que « les progrès technologiques vont plus vite que notre capacité à y répondre, voire à les comprendre. »

Un groupe de bandits a les moyens d’effacer la mémoire d’une société, d’une administration, d’une université, en instillant ses petites saloperies dans le réseau.

Nous possédons les tablettes (oui, déjà des tablettes !) racontant l’épopée de Gilgamesh, roi de Sumer, écrites il y a 4 500 ans. Des textes d’Egypte ancienne, les manuscrits de la mer morte écrits depuis le troisième siècle avant notre ère, les Classiques des documents et les Classiques des vers réunis dans l’empire chinois à partir du huitième siècle avant notre ère. Et les bibliothèques que nous ont laissées les scribes et les auteurs des siècles passés. C’est le papier qui a préservé notre mémoire, qui a sauvé nos civilisations, qui a préservé la survie de l’homo sapiens. Les attaques des pirates 2.0 sont un signal d’alarme contre l’abandon du papier, le tout informatique, l’élimination des archives après numérisation. Un orage survient, qui fait éclater les clouds… 

Comme l’écrivait Gainsbourg : « Laissez parler les petits papiers/à l’occasion papier chiffon/Puissent-ils un soir papier buvard/Vous consoler. »  

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AVEC SABENA, VOUS Y SERIEZ DEJA …

    Qu’on puisse à nouveau voyager sans fausses invitations ou d’hypocrites raisons impérieuses, qui n’en réjouira ? Mais, dans le monde d’après qui réapparaît timidement, profitons-en pour changer nos habitudes. D’ailleurs Neckermann a mis la clé sous le paillasson. Sea, sex and sun, c’est de l’histoire ancienne. Il faut trouver des destinations, des attractions nouvelles.

Parmi les suggestions originales, pourquoi pas Ankara ? La Turquie vient d’ouvrir aux touristes avec beaucoup d’opportunisme le palais où Erdogan a reçu il y a quelques jours les plus hautes autorités européennes. Dans la salle où s’est déroulée la rencontre, vous pourrez vous faire photographier dans le célèbre sofa où s’est allongée Ursula von der Leyen ou poser votre postérieur dans la chaise dorée où le président du conseil s’était empressé de déposer le sien. On vous prêtera même des mannequins représentant Charles et Ursula que vous pourrez disposer selon votre imagination.

Pour rendre la visite plus excitante encore, l’Ode à la Joie, l’air européen, est diffusé en musique de fond. Chaque fois qu’elle s’arrête, les visiteurs sont obligés de s’asseoir. Il y en a toujours un qui reste bêtement debout. Et qui est condamné à payer double tarif.  

Autre destination excitante, Fukushima. La pandémie ayant épuisé les budgets, le gouvernement japonais n’a plus les moyens d’entretenir les piscines de retenue des eaux contaminées par la centrale nucléaire déglinguée de l’île. D’où la décision de déverser ces eaux dans la mer. 

En voilà une idée ingénieuse pour attirer les curieux du monde entier ! On devine l’attrait de ce spectacle pour les casse-cous, toujours en recherche de sensations nouvelles et de défis débiles. Se faire immortaliser sous un million de tonnes d’eau, c’est autrement plus spectaculaire que la traversée des chutes du Niagara dans un tonneau ou des chutes du Zambèze sur un fil. En plus, l’eau de Fukushima scintille de mille feux même dans la nuit – votre peau aussi après la baignade et pendant quelques centaines de milliers d’années ! 

Cerise sur le gâteau, avaler du strontium-90 et du cesium-137, tous les gourmets vous le diront, c’est autrement plus capiteux et plus enivrant que du saké. 

La Belgique pourrait profiter de l’ouverture des frontières pour attirer les touristes étrangers. Et les séduire avec la richesse des collections de ses musées. Mais, surprise, ils sont fermés. Après le musée d’art moderne, dans les caisses depuis des années, le gouvernement refusant de financer un bâtiment pour l’accueillir, c’est maintenant le musée d’art ancien qui ferme faute de budget pour payer le personnel…

Qu’on ne s’étonne pas alors que les visiteurs préfèrent s’offrir Ankara ou Fukushima…    

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NOIRS ET BLANCS EN COULEUR

Alors que le thermomètre affichait 25° et que les vacances de Pâques pointaient le bout de leur nez bronzé, le bourgmestre de Bredene a eu la bonne idée d’annoncer la réouverture de ses plages pour nudistes. Aussitôt, le thermomètre a plongé de vingt degrés et l’on doit mettre des Moon boots pour s’aventurer sur la digue. Qu’on ne mette pas ça sur le compte du hasard. 

D’autant que la décision du maïeur pose pas mal de questions. Dans le climat actuel qui incite les gens à se grouper selon leurs affinités ou la couleur plus ou moins pigmentée de leur peau, ouvrir la plage aux nudistes sans autre protocole est devenu insuffisant. Ainsi, les nudistes doivent-ils tolérer à côté d’eux des touristes en maillot ? Si c’est le cas, tous les maillots sont-ils les bienvenus ? Le monokini, oui. Mais le burkini ? En d’autres mots, que peut-on cacher pour entrer sur la plage de Bredene ? Et faut-il montrer patte blanche ? 

Justement, ce sujet a été également oublié par le règlement de Bredene, qui se contente d’autoriser les plagistes à se mettre nu. Pas un mot sur la couleur de la peau. Rien même sur la langue, l’orientation politique, religieuse, sexuelle. Tolère-t-on des vacanciers ne parlant pas néerlandais, du moins pas à haute voix ? 

Pareille indifférence n’est plus de mise. Un nudiste ne doit pas supporter toutes les nuances de nudisme. Il peut exiger que son voisin de plage partage ses valeurs, ses opinions, ses orientations. Les autres n’ont qu’à se rhabiller. Universaliste est devenu une injure. Comme jadis cosmopolite.  

Que se passe-t-il si un couple d’homosexuels noirs refuse de supporter la proximité d’une famille « traditionnelle » d’immigrés chinois, composée d’un homme, d’une femme et d’enfants ? Peut-il prétendre les éloigner au motif que le bout de plage est réservé aux nudistes LGBT d’origine africaine s’abritant sous un parasol arc-en-ciel ? 

Déclarer la plage ouverte aux nudistes ne suffit plus si l’on veut être dans l’air du temps. Il faut « raciser » les plages comme les universités, les clubs, les théâtres. Noirs, jaunes, rouges, blancs, flamands, wallons, indigènes, exogènes, homos, hétéros, ouvrier, patron, etc, chacun sa serviette. 

Pour s’assurer qu’un membre d’une autre secte ne mettra pas les pieds sur son territoire, chaque groupe s’isolera dans un château de sable ou derrière de hauts murs. 

Heureusement, la mer du Nord connaît le phénomène des marées. Une fois que la mer descend, il ne restera plus rien des châteaux et des murs. Tout le monde sera à nu…

Ps : le titre de cette chronique est un clin d’œil au joyeux film de Jean-Jacques Annaud qui portait ce titre et qui a aussi été diffusé sous le titre « La victoire en chantant ».  

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DES VACANCES ? ET QUOI ENCORE !

Après une longue semaine de non-vacances scolaires, voici que commencent deux interminables semaines de vacances peut-être suivies de semaines de non-vacances à nouveau, surtout si, après le succès de leur grève pendant une journée de non-travail, les syndicats remettent le couvert…

Comment occuper les enfants pendant cette longue période ?

Pour éviter qu’ils ne restent affalés devant la télé, on peut s’arranger avec les voisins. Après deux heures de télé dans le salon, vos enfants montent chez les voisins regarder la télé tandis que les enfants des voisins prennent leur place. Renouvelez le manège toutes les deux heures. Jamais les gosses n’auront fait autant d’exercices. 

A ceux qui se désespèrent de la fermeture des théâtres et des concerts, on conseille les cimetières. On y entend des discours – certains valent bien quelques monologues du théâtre contemporain- et de la musique. C’est en tout cas la seule occasion de se retrouver à cinquante sans quarantaine…

Aux sportifs, on conseillera le kayak, l’activité préférée de Sophie Wilmès, mais en respectant la règle qui impose de pagayer uniquement côté fenêtre. 

De toute façon, c’est la seule façon de voir de l’eau car côté côte, c’est fichu. De Vlaamse Kust est mieux protégé des assauts des touristes que le Palais du Topkapi à Istamboul… Sauf à se déguiser en pêcheur de crevettes et prétendre que vous allez relever vos filets mais cette subtile tactique suppose que vous ayez de sérieuses notions du patois ostendais…

Faute de quitter la ville, vous pouvez évidemment vous rabattre sur la célèbre chasse aux œufs. Mais en respectant les prescriptions, dix à l’extérieur qui peuvent être vingt-cinq s’ils ont moins de 13 ans, mais qui ne peuvent traverser le salon avec des chaussures sales à plus de quatre (trois si l’un d’entre eux fête son treizième anniversaire). Il faut rappeler que vos visiteurs doivent utiliser les toilettes extérieures – la cabane au fond du jardin de votre aïeul redevient très à la mode. 

 Si un enfant se plaint que le chocolat ne goûte pas le chocolat, alerte, il faut immédiatement isoler tout le groupe. Sauf si les œufs sont du chocolat industriel anglais. Dans ce cas, pas d’inquiétude. C’est normal qu’il ait la même saveur que le plastique qui l’entoure. 

Rayon jeux, il y a le frisbee à condition de ne pas cracher dessus chacun à son tour. Ou la pétanque mais les boules doivent se trouver à 1,80 de distance du cochonnet, ce qui réduit singulièrement le plaisir du jeu.

  Je comprends que vous en ayez assez de toutes ces règles, que vous vous relâchiez un peu et que vous fassiez l’innocent devant les flics s’ils vous remontent les bretelles. Attention cependant : « C’est très joli d’être innocent, mais il ne faut pas en abuser » (Pagnol).

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CRISE EN THEME

Depuis combien de temps nous promet-on pour bientôt « le bout du tunnel » ? Cette éreintante litanie qui nous force à arpenter des voies sans fin. 

Le ton a changé au début du mois. On nous a alors poussés dehors. Allez, ouste ! Respirez le printemps ! Cueillez des fleurettes, humez les nouvelles pousses ! 

Patatras, ça n’a pas duré ! Cette semaine, retour brutal du frisbee. On nous ordonne soudain d’éviter tout commerce avec les autres. Et de retourner arpenter à quatre et masqués ce fichu tunnel, qui nous mènera peut-être en été… Qui sait ?  

Rappelez-vous cependant cette réflexion du dirigeant du syndicat français CGT quand Jacques Chirac a lui aussi prétendu voir « le bout du tunnel » : « S’il voit le bout du tunnel, c’est qu’il marche à reculons et qu’il confond l’entrée avec la sortie. »

Comme lui, nous avons l’impression de retourner un an en arrière quand tout a commencé et que déjà on nous assurait que dans deux, trois mois, nous verrions le bout…

On l’a compris, seule une vaccination de masse pourra remettre le wagon sur les rails. Mais elle s’étire, patine. On perd son temps à discuter sur le système d’inscription, le nombre de téléphonistes. On s’étripe pour décider qui vacciner après les ancêtres, les vieux et les survivants. Les profs ? (A quoi bon ? Ils n’ont plus d’écoles). Les flics ? Les bibliothécaires ? Les gars des immondices ?  

Pourquoi ne pas donner la priorité aux maîtres-nageurs ? Ils sont en première ligne puisque leur mission est de nous arracher aux nouvelles vagues et nous avertir de l’arrivée des prochains tsunamis (les précédents, on ne les a pas vus venir). 

Surtout, nous prévient-on, que ce vicieux virus n’arrête pas de muter. Quand il se met à s’exprimer en anglais, il est terrible sans doute parce qu’on ne comprend pas ce qu’il raconte. Et attention au redoutable brésilien, qui danse la samba dans nos pauvres organismes, défiant l’interdiction des carnavals. 

Depuis peu, on a trouvé une variante liégeoise qui ferait passer les boulets à la sauce chasseur pour un plat végétarien. Et certains évoquent à présent un variant molenbeekois très explosif. Malgré les protestations de la bourgmestre qui assure qu’il est devenu doux comme un mouton. 

Va-t-on nous expliquer bientôt qu’il nous faudra autant de vaccins qu’il y a de mutants ? Nous risquons d’avoir le bras plus troué que certaines stars de la pop disparues prématurément ! 

Cessons de pleurnicher ! disent certaines expertes. Après tout, les baby boomers que certains envient ont un long passé de tunnels et de crises successives depuis la fameuse crise pétrolière de 1973. Et cette errance dans l’obscurité a produit aux yeux des générations qui les ont suivis des mirages chatoyants et des inventions mirobolantes. Web, web, web, hourrah ! 

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COUVREZ CE VACCIN QUE JE SAURAIS AVOIR …

   Pour se faire vacciner, tapez 1, si vous préférez y’a qua Zeneca, tapez 2 bis ; pour spoutnik, tapez à la porte arrière ; pour un vaccin sans contestation, tapez aussi longtemps que vous voulez. Pour le vaccin Johnson & Johnson, faut un mot de passe (allez, je vous le donne : « Je dirais même plus »)…

   Certains ont des amis qui les appellent à la fin de la journée lorsqu’il reste des doses non injectées dans l’un ou l’autre centre de vaccination. Il y a aussi des gens qui se prétendent membres d’associations dont les représentants sont prioritaires. Une petite lettre de recommandation et le tour est joué. Ce qui permet à des gens de vingt ou trente ans de ne pas bêtement attendre leur tour comme les autres et de perdre quelques semaines. On comprend leur impatience. Ils sont pressés de s’envoler pour des vacances à l’étranger. Alors qu’un octogénaire, pourquoi le piquer par priorité? Il a le temps. Il n’attend pas d’aller bronzer sur une plage exotique, si ?  

  Il faut de l’astuce, d’après ce qu’on me dit, pour décrocher une invitation à la piquouze. Une idée, se déguiser en vieillard. Facile : les maquilleuses de talent ne manquent pas. Elles se réjouiront de transformer un jeune homme en vieux birbe plutôt que de se tourner les pouces en déprimant devant les portes fermées des théâtres. 

Mais l’apparence n’est que la première étape. Faut aussi modifier la date de naissance dans les bases de données. Une opération plus aventureuse. Mais, comme toujours en Belgique, avec un copain de copain, on doit y arriver. Une piste, un nom (ne le répétez pas) : Frank Robben, l’homme à tout faire (surtout le pire) dans la centralisation des données des habitants du royaume. Il vient de recevoir le prix du Big Brother de l’Année, décerné par Ministry of Privacy. Frank Robben est tout à la fois le concepteur des bases de données en matière de santé et de sécurité sociale, le patron de la gestion de tous ces fichiers, son propre contrôleur et son juge. Un petit mot (de préférence en néerlandais) et hop ! votre fiche se remodèle comme par magie. Et comme personne n’a le droit de regarder au-dessus de l’épaule de Big Brother Robben, s’il accepte de mélanger, de nettoyer et de vous sortir des données toutes propres, votre identité reflètera votre nouvelle apparence. Estampillé vieux. Et en route vers le centre de vaccination le plus proche. Reste encore le plus dur, vous inscrire par internet, tapez 1, puis 3, puis 17, puis 421, puis changez de langue après avoir changé d’apparence…

  Si vous êtes convoqué à 10 h 26, préparez-vous à deux heures de file surtout si vous ne tenez pas sur vos quilles…   

Et si vous n’avez pas d’ordinateur ? Vous n’existez pas. Dans ce cas, couvrez ce vaccin que vous ne saurez avoir…

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FEMMES PERDUES DANS UN TUNNEL

  Les femmes ont été à l’honneur cette semaine, a-t-on proclamé ici et là la bouche en cul-de-poule. Est-ce si sûr ? 

Faut-il célébrer comme une grande victoire féministe, le changement de nom du tunnel Léopold II  bombardé Annie Cordy ? 

Tandis que le boulevard en surface, éclairé par le soleil et peuplé de milliers d’habitants, reste dénommé Léopold II, son sous-sol effrayant, pollué, fermé chaque fois qu’on a envie de s’y aventurer, se voit collé le nom d’une femme. Dr Freud, sors de ce tunnel ! 

Pourquoi ne pas avoir donné le nom d’Annie à un music-hall (dépoussiérant par exemple l’Ancienne Belgique), à un parc, une fontaine ? A l’heure du politiquement correct tous azimut, l’interprète de « Cigarettes, whisky et petites pépés » méritait d’être mieux à l’honneur pour tous les dérapages qu’elle a glorifiés ! 

Bon, j’avale une petite gorgée et je reviens à vous. Où en étais-je ? Ah oui, les femmes ! Une autre lady à l’honneur cette semaine, Meghan Markle. Qui dénonce l’étouffoir corseté des palais et entourages royaux britanniques. Elle n’avait pas lu la moindre bio de sa pauvre belle-mère, Lady Diana, avant de signer ? Elle a découvert le mode d’emploi une fois plongée dans le smog londonien ? Son mari, le prince Harry, se tient drôlement mieux avec son épouse que son beau-père mais cela n’a pas empêché, dit-elle, des propos racistes lorsqu’elle attendait son bébé. Dans un pays où la majorité des électeurs ont voté pour le Brexit en imaginant que l’empire allait surgir comme par magie du néant, on imagine que dans les couloirs de Buckingham, certains croient que la reine Victoria règne encore sur le monde. 

Autre femme belge en vedette, notre ambassadrice en Arabie saoudite. On se disait que c’était une sacrée provocation de notre ministre des affaires étrangères (une dame) d’avoir envoyé Dominique Mineur dans les sables du Moyen Orient. Pas du tout. Notre diplomate a célébré la journée des droits des femmes en vantant les « changements fantastiques » en la matière. Quelle mouche l’a piquée ? A Ryad, l’alcool est interdit, non ? La famille de Loujaine Al Hazlthoul (condamnée et torturée pour avoir prôné la liberté pour les femmes dans son pays) est installée chez nous. Loujaine est docteur honoris causa de l’UCL. Elle a dû apprécier les bonnes paroles de la Belgique officielle, la révérence à la politique du prince BMS. Dieu sait quels discours tiendra Madame Mineur quand elle sera nommée en Chine, à Hong Kong, en Iran ou au Yemen. 

Faudrait plutôt faire représenter la Belgique dans le monde par nos merveilleuses athlètes Nafi Thiam et Elise Vanderelst, auréolées de leurs médailles, championnes souriantes, assurées, et tellement craquantes en noir-jaune-rouge. Allez, les filles !

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TOUS PIQUES !

    Avec l’arrivée des beaux jours, on nous promet celle des vaccins, juré-craché si je mens, je vais en enfer. D’ailleurs, ils sont là, paraît-il. Sagement entreposés dans des super-frigos, comme les cadeaux de Noël fabriqués en été mais qu’il est interdit de déballer avant la nuit-douce nuit sous le sapin. Alors qu’attend-on ? Le premier jour du printemps ? Mais le 21 mars est un dimanche et les vaccinateurs ce jour-là sont en week-end. En semaine, on vaccine de 9h à midi – à condition que les TEC ne soient pas en grève. 

D’autres prétendent qu’il faut attendre que le signal de vrai départ soit donné simultanément par les gouvernements fédéral, wallon, flamand, bruxellois, communautaires, germanophone, celui de la COCOM, de la COCOF, de la COCORICO et tutti quanti. 

A propos, quelqu’un se rappelle qui a la clé de ces foutus frigos ? Car, grmmbl, chacun se rejette la responsabilité. Même que Jan Jambon a dit que si le responsable ne lève pas le doigt tout de suite, tout le monde va être puni.

Bon, on se calme ! répète le ministre de la santé aux huit autres. Il avait d’abord annoncé fièrement que son « team » va faire « reset ». Retombé sur terre (c’est-à-dire en Belgique), il a compris que cet hommage à l’informatique était déplacé vu qu’elle s’est complètement plantée jusqu’ici. L’image des start-up innovantes qui allaient convoquer les citoyens plus vite que leur ombre a pris un sérieux coup dans l’aile.   

La réorganisation de la vaccination s’est évidemment faite à la belge. De façon imaginative mais différente selon les régions. En Wallonie, l’idée de génie est d’avoir décidé d’organiser la vaccination dans les bistrots. Permettant de sauver en même temps la santé des gens et celle de l’Horeca. 

A Bruxelles, le ministre-président avait d’abord annoncé avoir obtenu le consensus de son gouvernement pour que la vaccination se fasse en taxis. On en voit les avantages : pas de file d’attente, pas de difficultés de déplacement pour les personnes à mobilité réduite, et surtout une magnifique compensation pour aider les taximen face à la concurrence déloyale des Uber. Mais très vite, on a entendu des voix discordantes. Alain Maron veut limiter les véhicules autorisées pour la vaccination aux vélo-taxis, Pascal Smets aux véhicules de la STIB et l’opposition libérale veut y associer les Uber. Bon. Je vais trouver un texte de compromis a promis Rudi Vervoort. Sinon, je me rase la moustache. 

En Flandre, la vaccination est réservée aux personnes parlant néerlandais. Seuls celles qui prononcent parfaitement « schild en vriend » sont admis dans les vaccinatiecentra. Celles qui échouent ont droit à six mois de cours de recyclage et à un nouvel essai de vaccination en septembre après examen linguistique. 

Dura lex sed lex, a commenté sobrement Bart De Wever.  

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FILIGRANES / FEVRIER-MARS 2021

Alain BERENBOOM dédicace « en life » sa nouvelle enquête de Michel Van Loo, détective privé, MICHEL VAN LOO DISPARAÎT.

Chez FILIGRANES – 39, avenue des Arts-Bruxelles (près place Madou) :

  • mercredi 24 février dès 17h30
  • dimanche 14 mars à partir de 15 h

Entretemps, découvrez une récente interview d’Alain Berenboom par Jean-Baptiste Baronian

CASQUES BLUES

   A quoi sert l’ONU ? Après l’assassinat en RDC de l’ambassadeur d’Italie et deux de ses accompagnateurs, comment ne pas se poser une fois de plus la question ? La mission de l’ONU pour le Congo a été créée en 1999. Vingt et un ans de présence dans les provinces de l’est, vingt et un ans de violence, de cruauté. On y est assassin de père en fils ! On suppose que le métier permet d’épargner pour ses vieux jours sinon les nouvelles générations seraient devenues médecins, infirmières, profs ou commerçants, voire politiciens, plutôt que tueurs comme papa. Hélas, le magnifique docteur Mukwege, prix Nobel de la paix, « l’homme qui répare les femmes », n’est pas prêt de prendre sa retraite. 

Pendant ce temps, les génocidaires hutus rwandais qui ont pu s’enfuir au Congo avec armes et bagages, avec la complicité des autorités françaises de l’époque (président socialiste et ministre des affaires étrangères de droite, en union sacrée comme le soulignait récemment Colette Braeckman) ont implanté un empire basé sur la terreur sans que les braves troufions en casques bleus n’aient manifestement entrepris ni surtout réussi quoi que ce soit qui mette fin à ce cercle infernal. 

Ce qui rappelle d’autres horreurs que les « missions » de l’ONU ont préféré ne pas regarder. Le génocide des tutsis, abandonnés à leur triste sort (autant que les militaires belges chargés de protéger la première ministre, tous tués comme elle). Quand on commence à se tirer dessus, les casques bleus se rappellent généralement qu’ils ont autre chose à faire que de s’interposer, le plus souvent faire leur barda… 

Au même moment, d’autres civils se faisaient massacrer en ex-Yougoslavie. Avec en point d’orgue, Srebrenica en juillet 1995 (qualifié de génocide par le TPI, lors du procès du général Mladic). Cette fois encore, les troupes de l’ONU se sont battus pour ne pas éviter les massacres, les casques bleus hollandais sur place allant jusqu’à aimablement aider les Serbes à séparer femmes et hommes et à indiquer les refuges de certains habitants (les tribunaux hollandais ont condamné les Pays-Bas depuis). Quant à l’état-major, dirigé par le général français Janvier, il a refusé tout appui aérien à ses casques bleus, ce qui aurait permis sans doute de bloquer l’avance serbe, à la suite d’un accord conclu avec Mladic ! 

Les envoyés de l’ONU ne travaillent qu’à assurer le fonctionnement de la machine de l’organisation internationale dans un mouvement perpétuel qui laisse sur le côté tous autres que les fonctionnaires de l’ONU. 

Ne remontons pas plus dans le temps, on trouverait à chaque envoi de casques bleus la même impuissance, parfois la même complicité. 

Peut-être qu’il faudrait en tirer enfin une leçon simple : faire la guerre et surtout rétablir la paix sont des activités trop sérieuses pour les laisser aux soldats habillés de bleu par l’ONU. 

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