Pentecôte, fête de l’esprit sain. Justement, c’est le thème de notre feuilleton médiéval.
Résumé des chapitres précédents. Au pays noir, comme ses barons ont commis quelques vilenies pendant que son grand vizir regardait ailleurs, le roi Autiste 1er a décidé d’abdiquer. Son bon peuple l’ayant supplié de rester, Autiste, un brave au fond, a repris sa couronne et s’est rassis sur le trône vingt-quatre heures plus tard. Son collègue, son modèle, le roi Baudouin, n’avait-il pas montré l’exemple quelques années auparavant ?
Devant le désordre causé par les méchants barons, l’Empereur a un peu grogné mais, comme il est indulgent, que le grand vizir a roulé des yeux plein de colère et grincé des dents et qu’Autiste a beaucoup pleuré, l’Empereur a passé l’éponge. Et voilà. Tout est bien qui finit bien. Et qui se termine comme toutes les histoires se termine par un grand festin. Du pain et des jeux.
Le jeu proposé par les troubadours s’appelle Le Geste fort. Pour être franc, certains courtisans ont été un peu déçus. Ils auraient préféré « La Galette des rois » ou « Comment gagner des millions ? » mais comme F 1 n’existe pas encore, ils se sont inclinés.
En général, Autiste 1er n’aime pas beaucoup les ménestrels. Il ne comprend jamais très bien leurs bouffonneries, pasquinades et autres turlupinades. Mais, comme chacun sait que Le Geste Fort est le jeu préféré de l’Empereur, il s’incline de bonne grâce. Surtout que le grand vizir a promis de tout lui expliquer un jour. Pas contrariant, notre bon roi.
Le gagnant est un ami du grand vizir, un petit courtisan qui a eu l’idée amusante de disparaître en plein milieu du banquet. Bravo, ça, c’est vraiment un vrai geste fort ! Va-t-il réapparaître un jour ? se demandent les autres participants avec un sourire dans le coin. Peu importe, sa fille est restée dans la salle du trône à banqueter avec les autres membres de la cour et leurs ambitieux bambins et à dévorer les viandes juteuses offertes généreusement par la populace du royaume. On ne doute pas qu’elle remplira un tupperware pour son papa.
Pendant ce temps, dans le fief voisin, une autre aventure se prépare. Le roi Ahuri 1er est en butte aux attaques de quelques croquants. Pas contents que le roi offre à sa mie tous les jours de coûteux jeux de construction. C’est qu’elle s’ennuie, la pauvre, dans son château endormi entre Meuse et Sambre. Et c’est un plaisir bien innocent qu’Ahuri partage avec sa dame. Devant les grognements, comme il déteste discuter et qu’il aime ses gens, il décide, lui aussi, de faire un geste fort : désormais, il regardera ailleurs quand sa mie ouvrira sa boîte de Lego.
Et l’Empereur ? Croyez-vous qu’il a le temps de s’occuper de ces enfantillages ?
Alain Berenboom
Paru dans LE SOIR