TERRE D’ASILE

 Nicole de Moor est-elle une femme ?

La question se pose sérieusement à l’annonce par la secrétaire d’état à l’asile de sa décision de renvoyer manu militari en Afghanistan les demandeurs d’asile afghans car, décrète-t-elle benoitement, il n’y a plus de risque de persécution au royaume des mabouls de Kaboul. 

On peut excuser Nicole de Moor de ne pas saisir les subtilités du dari ni du pachto, les langues officielles du pays. Mais les observateurs du monde entier dénoncent les mesures de plus en plus effroyables contre les femmes. Amnesty International évoque un crime contre l’humanité. Le procureur de la Cour pénale internationale a demandé des mandats d’arrêts contre deux des dirigeants talibans et le Parlement européen a voté une résolution dénonçant les graves violations des droits entraînées par la loi sur « la promotion de la vertu et la prévention des vices » (sic). Condamnant les femmes à ne plus exister dans la vie publique, ne plus parler en public, ne pas regarder les hommes. Interdiction d’aller à l’école, d’exercer un boulot. Elles doivent même masquer les fenêtres de leur maison si elles risquent d’être vues.   

  Nicole de Moor est-elle une femme ? 

Peut-être renvoie-t-elle les Afghans réfugiés chez nous en se disant cyniquement que dans un régime où la femme est persécutée comme nulle part ailleurs, les mâles ne courent aucun risque. 

  Si, rentrés chez eux, ces Afghans racontent autour d’eux comment vivent les femmes en Flandre, ils sont bons pour la le cachot ou pire. Un proverbe afghan dit : « Donne un cheval à celui qui dit la vérité. Il en aura besoin pour s’enfuir »…

Mais le sort des femmes n’intéresse pas Nicole de Moor. Sa mission est de nettoyer le pays de tout étranger. Peu importe les condamnations des tribunaux (près de neuf mille !) pour non-respect du droit d’asile. 

Comment laisse-t-on en place une ministre qui se fiche autant des lois et de la justice ? Il est fascinant de la voir s’acharner, s’entêter alors qu’elle n’est plus chargée que d’expédier les affaires courantes dans un gouvernement pratiquement disparu. Renvoyer des êtres humains dans cette prison qui s’appelle l’Afghanistan, une affaire courante ? Alexandre De Croo, réveille-toi ou vous allez tous être contaminés !

Si Nicole de Moor avait été jadis en charge de la migration, Sammy Mahdi ne serait jamais devenu président de son parti car son père, arrivé comme réfugié, aurait été renvoyé en Iraq – comme le mien en Pologne.

On suggère à Nicole de Moor de méditer la phrase célèbre de Simone de Beauvoir : « On ne naît pas femme. On le devient. » Son chemin pour y arriver est manifestement encore long…     

PS : le titre en hommage à l’un des romans emblématiques de Pierre Mertens qui vient de s’en aller.

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