SOLDATS DE PLOMB

chronique
Jadis, les choses étaient simples : d’un côté il y avait les vilains tyrans, de l’autre les braves résistants et les irréprochables démocraties. Que c’était reposant ! Les choses se sont singulièrement brouillées depuis. Le ying et le yang n’y retrouvent plus leurs petits.
Du côté du pouvoir, s’il reste quelques dictateurs à l’ancienne, ce sont désormais des pièces de musée, modèle Kim Jong-Il, le leader bien aimé respecté de Corée du Nord. Les potentats modernes ont parfaitement digéré le mode d’emploi de la démocratie et l’avantage médiatique d’une bonne journée d’élections. L’apparence de démocratie suffit pour profiter des largesses des Américains et des Européens, recevoir un beau télégramme de félicitations du président Sarkozy et faire partie de cette si respectable « communauté internationale », le club des gens bien.
Poutine, ayant fait disparaître – plus ou moins- légalement les principaux media d’opposition (et leurs journalistes) et cassé toute opposition politique en envoyant les uns en exil et les autres en prison, a démontré la supériorité de la loi et de l’ordre sur la méthode bête et brutale du parapluie bulgare que lui enseignaient ses maîtres. Au Congo, Kabila a très bien appris comment l’enfant d’un coup d’état pouvait être élu d’un coup de baguette magique (avec les félicitations et l’argent des plus exemplaires démocraties). Au Pakistan, le pervers Musharraf a imaginé un excellent moyen pour assurer son poste : puisque la cour constitutionnelle refusait de le nommer, il suffisait de nommer une autre cour pour gagner les élections. En Iran, seul Dieu décide qui est candidat et qui va en prison, ce qui évite les mauvaises surprises. Fez blanc et blanc fez.
Les rebelles ne sont pas en reste. Elle est loin l’époque où l’on admirait les magnifiques barbudos de Cuba qui allaient balayer les affreux Américains et les courageux Vietcong qui défendaient leur pays envahi par les barbares. Mieux vaut oublier ce que sont devenus Castro et Hô Chi Minh arrivés au pouvoir. Leurs enfants sont pires. Les images et la lettre de Ingrid Betancourt ont définitivement convaincu les candides que, quel que soit le dégoût que l’on peut ressentir face à certains dirigeants colombiens, les FARC ne sont qu’une bande de criminels brutaux et inhumains. Ne valant guère mieux que leurs cousins du Sentier Lumineux au Pérou et leurs clones talibans d’Afghanistan ou d’Irak. Sans oublier certains guérilleros auto-proclamés d’Afrique.
Au moment où nos apprentis politiciens s’amusent à jouer à cache-cache dans une pièce obscure appelée Belgique, il est bon de se rappeler que la démocratie et la liberté sont plus fragiles que le verre du Val Saint-Lambert.

Alain Berenboom
www.berenboom.com