L’AFFAIRE ALZHEIMER

chronique
Chez les De Wever, papy n’a pas fait pas de la résistance, c’est entendu. Mais est-ce la faute de Bartje si son grand-père était un vieux dégueulasse ? Bart n’est pas plus responsable de la collaboration de son aïeul avec les nazis pendant l’occupation que Catherine Deneuve de celle de son père avec les pétainistes (quoique laisse entendre une biographie récente très équivoque.) La magnifique comédienne a montré en d’autres occasions ses engagements, et parfois dans les personnages qu’elle a voulu jouer à l’écran. Son rôle dans « le Dernier Métro » de François Truffaut sonne un peu comme une revanche sur la noirceur paternelle. Bart n’a malheureusement pas eu l’occasion de déployer ses talents devant une caméra. A entendre ses déclarations de la semaine, cela vaut mieux pour la réputation internationale du cinéma belge, à moins de lui faire tourner dans un remake de « L’Affaire Alzheimer ».
Car pour un historien de formation, c’est gênant d’oublier le passé de sa propre métropole, surtout qu’un rapport récent commandé par le Sénat (encore une bonne raison de couper les ailes du pouvoir fédéral !) au Centre d’étude de la seconde guerre mondiale, intitulé « Une Belgique docile », a rappelé à tous ceux qui ont la mémoire courte les abominations d’une grande partie de l’administration communale et de la police d’Anvers, allant (comme la police et une partie des fonctionnaires de Pétain) bien au-delà de ce que demandait l’occupant. Mention de « juif » apposé sur les cartes d’identité, distribution de l’étoile jaune, regroupement puis déportation des juifs vers Auschwitz. On excusera peut-être Bart de Wever de son ignorance : au moment de la parution de ce rapport, il yodlait avec sa famille en culotte de peau en Bavière, sa destination de vacances favorite, comme le révèle son épouse dans une interview fleur bleue. Allez, un petit effort, Bart ! Tu n’es plus très loin des terres de ce cher Haider. Essaye, l’Autriche. Tu t’y sentiras bien. Un pays qui n’a jamais évalué le rôle de son administration pendant la guerre ni jamais présenté d’excuses à personne sauf aux clients de ses banques, obligées de revoir leur système opaque depuis les directives européennes.
Bart De Wever a aussi la mémoire sélective : Anvers a été une ville occupée, s’est-il souvenu, et victime des Allemands. Façon d’oublier les victimes de la ville victime. Et d’ajouter qu’Israël et Hitler, c’était à peu près kif kif, histoire de convaincre lesdites victimes qu’elles étaient devenues des bourreaux.
Les négociations pour la formation du gouvernement reprennent lundi. Avec De Wever. Que se passerait-il si les autres participants du pow wow arboraient l’étoile jaune ?

Alain Berenboom
www.berenboom.com